"39 - 45.
L'émouvant "Mon p'tit Kaki" chanté par Lucienne Boyer exprime sourdement l'incertitude d'un pays en apparence mobilisé.
A l'abris de la ligne Maginot, on se moque des défenses allemandes "On ira pendre notre linge sur la ligne Siefried". "Ils ne gagneront pas" et "Ça fait d'excellent Français" prennent le relais. "Il travaille du pinceau", "It's a long way to Tipperary", "Bonjour Tommy" sont de la même veine.
La peur est là. "Francine" par Fernandel fait allusion à la propagande du maître Ferdonnet à radio-Stuttgart. l'absence des mobilisés se fait de plus en plus sentir. "Dans un coin de mon pays", "Un petit mot de toi", "Revenir".
Les restrictions commencent et les premières cartes d'alimentation apparaissent. Les avions ennemis menacent mais Maurice Chevalier affirme "Paris sera toujours Paris". Tandis que Jean Tranchant se fend d'un curieux "Chant du bonheur".
L'exode massif et la débâcle soudaine vont laissé la France sidérée.
A Paris, Georgius s'adapte aux circonstances et commente les restrictions "Elle a un stock", "En vélo" sur le ton moqueur qui lui est familier. Entonné le matin dans les écoles par les maîtres comme les élèves, Maréchal nous voilà se veut l'hommage de toutes les générations de Français à celui qui leur a fait don de sa personne.
A la radio, le rendez-vous hebdomadaire "Cette heure est à vous" destiné au public féminin cartonne. Dans l'émission de la BBC, "Les Français parlent aux Français", Maurice Van Moppès commence à chanter des refrains acerbes comme "Complaintes d'une occupée", on entendra ensuite fredonner l'air de "La Cucaracha".
"Radio-Paris ment,
Radio-Paris ment,
Radio-Paris est allemand".
Et Radio-Paris réplique sur l'air "Auprès de ma blonde" :
"Aux jardins d'Angleterre
Les bobards sont fleuris
Tous les meneurs du monde
Parlent à la BBC
Au gré de ces ondes,
Qu'il fait bon, fait bon, fait bon,
Au gré de ces ondes,
Qu'il fait bon mentir."
La guerre des ondes va aller grandissant.
Arletti fredonnera en 43 "Et puis après (je suis comme je suis)" dans "Les enfants du paradis".
C'est la mode du swing. "Etes-vous swing ?" demande Guy Berry. Georges Pills relate "Elle était swing", Georgius brocarde une fois de plus la mode avec "Mon heure de swing".
La France compte 1,8 millions de prisonniers. Les chansons sur le thème de la séparation douloureuse, de la solitude ou du serment de fidélité abondent. "Attends-moi mon amour", "Seule ce soir", "Tu pourrais être au bout du monde".
La chanson aspire ensuite à l'évasion dans un passé idéalisé "Petite soeur angélique", "La légende du troubadour", "Robin des bois". Ou bien au rêve de pays devenus inaccessibles : "Si vous voulez savoir", "Querida", "Fiesta gaucho", "Sérénade indochinoise", "Cherche une guinguette".
On attend et espère des jours meilleurs.
"Insensiblement", "Les fleurs sont des mots d'amour" prennent le relais. Suivi de "Rêver", "Tout en flânant", "Un souvenir", "Mon amant de saint-Jean", "Un peu d'amour, un peu d'espoir", "Marjolaine", "Douce France", et surtout le poignant "Que reste-t-il de nos amours ?" enregistré magnifiquement par Lucienne Boyer. Trenet signe "Si tu vas à Paris" qui sera chanté au-delà des frontières par nombre d'artistes exilés.
Jacques Pills dénonce le marché noir avec "Marché rose".
La relève des prisonniers inspire quelques chansons "Dans le chemin du retour", "Quand tu reverras ton village", "Pour fêter ton retour".
Mais avec le STO, le ciel s'assombrit encore.
En 43, c'est le succès de "Compagnons, dormez-vous ?" tandis que les zazous déboulent. Irène de Trebert, Johnny Hess avec "Mettez-vous dans l'ambiance" et "Ils sont zazous".
Et enfin, la libération...
Très écoutée par les Français, la radio suisse diffuse chaque semaine "La chanson de Renée Lebas". Cette dernière enregistre là-bas des succès français du moment ("Insensiblement", "On s'aimera quelques jours", "Seule ce soir" de même que des chansons de son répertoire "De l'autre côté d'la rue", "exil"). Elle chante un bouleversant "Ce soir je pense à mon pays".
Radio-Londres, de plus en plus écouté, enchaîne avec "Ceux du maquis", "La défense élastique", "Complainte de fin d'année", arrive ensuite "La chant des partisans" avec une autre composition magnifique d'Anna marly "La complainte du partisan".
Les mouvements de résistance s'amplifient. "Nazi, prends garde à toi !" en est le parfait exemple. "
Ouf, on respire.
La libération de Paris entraîne une floraison de chansons : des tracts apparaissent, ainsi "Le rêve d'Hitler" sur l'air de "cadet rouselle". Les grands succès associés à cete euphorie sont "Fleurs de Paris", "Ma voiture contre une Jeep".
Suivront "Paris Tour Eiffel" de Jacques Hélian, "Le rythme américain" de Lily Fayol, "La belle de Cadix" de Mariano, "C'est loin tout ça" et "Pigalle" de Georges Ulmer, "Luna Park" et "La grande cité" de Montand et "Ah le petit vin blanc"...
On chante dans les quartiers...
Si Edith Piaf et Tino auront passé la guerre sans encombre, d'autres ont eu plus de mal comme Chevalier, Trenet, Marie Dubas et enfin d'autres beaucoup plus difficilement comme Leo Marjane, Fréhél ou Lys gauty.
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