"1955.
L'attraction de l'année est la présentation à Paris, au mois d'octobre de la Citroën DS au salon de l'automobile.
Ma Mamie m'a dit que la DS était capable de rouler sur 3 roues. Elle était aérodynamique, dotée d'une suspension hydropneumatique, d'une assistance hydraulique de la direction, de l'embrayage et de la boîte de vitesse.
C'était une révolution ! Détail : nos voisins espagnols l'ont baptisé El Tiburon.
Le requin.
Mais quel est ce géant des mers qui fait tant parler de lui sur terre ?
Jeudi 6 octobre 1955. 9 heures du matin. Les employés du grand Palais, à Paris tremblent légèrement. Autour d'eux la foule retient son souffle.
Silence.
Avec précaution, les hommes ôtent la bâche qui cache une voiture auréolée de beaucoup de mystère. Son nom de code est le VGD (véhicule de Grande diffusion). Il a déjà occasionné descentes de police et perquisitions auprès de certains journaux voulant divulguer le scoop de sa sortie.
Lorsque les ouvriers eux-mêmes découvrent la voiture, c'est l'émeute. C'est à celui qui verra, montera le premier dans la Citroën. Son nom officiel est est dévoilé : la DS 19. le soir même 12000 commandes sont passées à 940 000 francs l'unité ! A la clôture du salon de l'automobile, les responsables enregistrent 80 000.
A l'époque, ce chiffre correspond à 2 ans de production chez Citroën !
De quoi en perdre les pédales...
Comme l'avion Concorde ou le paquebot France, ce véhicule va devenir un emblème pour notre pays. Plusieurs facteurs y concourent. Après des décennies de traction avant noires, la DS affiche des formes aérodynamiques révolutionnaires comme dit Mamie mais il y a aussi des coloris inédits : champagne, jonquille, aubergine... Sa ligne surprenante est l'oeuvre d'un sculteur italien de renom, Flaminio Bertoni, qui d'un trait de crayon a transformé radicalement le design de l'automobile.
Sa technologie bouleverse aussi les standards de l'époque et relègue tout d'un coup à l'obsolescence toutes ses concurrentes, la Renault Fregate, la Peugeot 403, la Simca Vedette...
Le mythe DS s'amplifiera lors de l'attentat du petit clamart contre le général de Gaulle. Ce jour-là, le 22 août 1962, le cortège présidentiel vient de quitter l'Elysée pour se rendre à Villacoublay. il est pris à partie par trois hommes de l'OAS armée de pistolets-mitrailleurs. Malgré deux roues crevées et quatorze balles qui traversent l'habitacle, la DS parvient à échapper au commando.
Le général de Gaulle ne jurera plus que par cette "déesse" qui lui a sauvé la vie, tout comme les réalisateurs qui lui offriront de nombreux rôles de cascadeuse. Rappellons-nous de la DS transformé en avion dans Fantômas, coupée en deux dans Le cerveau ou hachée menue dans les Tontons Flingueurs.
En 1972, elle monte sur le podium de la Ronde hivernale de Chamonix, après avoir parcouru la quasi-totalité de la course sur trois roues !
Un soir de confidence, ma Mamie m'a dit : "Tu sais, ce qui importe, ce n'est pas la voiture, ni le voyage, c'est celui avec lequel on voyage..."