"Les années 20,
L'aéroport du Bourget devient un mythe après l'atterrissage de Lindbergh en 1927.
L'Amérique est désormais a porté de main.
Chaque orchestre de danse s'intitule froidement "jazz", même s'il ne dispense que des valses musettes ou des tangos. Les nouveautés sont d'abord jouées dans les bals musette et les dancings.
La radio est balbutiante, le cinéma ne parle et ne chante pas encore.
Véritable carrefour artistique, où les carrières déclinantes des gloires du café-concert (Mayol, Dranem, Dalbret, Bérard, Dona, Montel, Esther Lekain, Polaire, Eugenie Buffet, Yvette Guilbert pour ne citer qu'eux) côtoient l'ascension de vedettes apparues sur scène avant 1914 (Maurice Chevalier, Mistinguett, Damia, Fréhel, Nitta-Jo, André Turcy, Gaby Montbeuse, Ouvrard, Bach, Milton, Georgius, Boucot, Georgel, Vorelli, René de Buxeuil, Dréan...).
Tandis qu'une nouvelle génération de chanteurs commence à trouver son public comme Lys Gauty, Lucienne Boyer, Marie Dubas, Parisys, Florelle, Germaine Lyx, Jane Aubert, Cora Madou, Berthe Sylva, Saint-Granier, Koval, Alibert, Perchicot...
Des étoiles foudroyantes sont foudroyées en pleine gloire, victimes de la maladie ou d'excès de toutes sortes (Fortugé, Emma Liébel, Yvonne George, Claudine Boria, Jenny Golder, Régine Flory) laissant le souvenir de natures qui auraient pu marquer davantage l'histoire de la chanson.
Le music-hall a grand spectacle vit son âge d'or.
La formule de la revue, composée d'une succession contrastée de tableaux fastueux, est désormais bien rodée. On veut faire du "toujours plus beau, toujours plus nouveau !".
Souveraine incontestée du genre, mais jalousée, Mistinguett règne sans partage sur la Place Blanche jusqu'en 1928. Maurice Chevalier tire aussi son épingle du jeu avec Harry Pilcer, Saint-Granier, Jane Marnac, , Jane Aubert, sans oublier Jenny Golder.
Marie Dubas triomphe avec "Pedro", "Lise" et "Marguerite".
Damia - la tragédienne de la chanson -, interprète quant à elle des oeuvres noires ("La suppliante", "Hantise", "J'ai l'cafard", "La rue de la joie") d'une voix rauque et brisée, avec les gestes et le port de tête d'une grande prêtresse).
L'opérette revient à la mode. Elle va servir d'école à de futures vedettes du théâtre et de l'écran (Arletty, Gabin, Pauline Carton, Fernand Gravey...).
De nombreux airs deviendront populaires au point d'entrer dans le répertoire des chansons de rues.
Ainsi "Dans la vie faut pas s'en faire" créé par Chevalier dans l'opérette Dédé.
Le comique Milton s'illustre aussi dans l'opérette et entonne des couplets pas toujours très fins comme "Je t'emmène à la campagne", "La fille du bédoin", "On se fait pouèt pouèt" ou "Si j'étais chef de gare".
Un public "à la page" comme on dit alors préfère le cabaret. Même s'il est de bon, de toute façon, dans les années 20, de jouer le grand écart.
Après l'exposition des Arts décoratifs de 25, Paris est en proie à une folie de charleston. La chanson réaliste cartonne aussi avec Fréhel qui fête son grand retour.
La chanson idiote n'est pas en reste avec Quand "Zezette zozotte", "Petit loulou de Poméranie") sans oublier le comique troupier "J'suis content, content" et l'exotisme de pacotille font toujours recette avec "Nuits de Chine", "Sur le Bosphore", "Miralda"...
La chanson vécue, épigone de la chanson réaliste, vit ses dernières années avec "Viens Maman", "Les roses blanches"... L'apparition de parodies est souvent le signe d'un déclin : on peut ainsi entendre " Le fils père" de Geogius" ou "Pour acheter l'entrecôte" de Romain Goupil.
La TSF commence à s'implanter dans les foyers. Le cinéma parlant déferle des Etats-Unis en 29 avec "Broadway melody" et les films d'Al Jolson.
Happé par Hollywood la même année, Chevalier nous revient via le grand écran avec "La chanson de Paris" où il interprète "Ma Louise" et reprend Valentine, son grand succès de 25. L'Olympia et le Moulin-Rouge sont alors transformés en cinémas mais d'autres salles de music-hall dédiées aux revues à grand spectacle comme les Folies-Bergère ou le Casino de Paris résisteront aux attraits du rêve sur pellicule pour continuer d'offrir au public des beautés en chair et en plumes.
Rideau.