"A m'en déchirer le coeur.
Je ne vais pas bien. Je ne vais pas bien du tout. Je suis accablée, complètement vidée émotionnellement et psychologiquement. Les semaines, les mois passent et je sombre dans une profonde dépression.
Je vis tel un zombie.
Certaines nuits, je traîne au drugstore des Champs-Elysées et je ramène n'importe quoi à la maison. Des fausses étreintes, des soupirs simulés, des mots d'amour bafoués. Je fais semblant d'y croire histoire de me sentir un peu plus vivante que morte.
Dans les bras de ces inconnus, je me perds encore un peu plus au lieu de me trouver, de me retrouver. L'zamour facile, l'amour chic et toc, c'est tout ce qui me reste comme sensation forte. Je ne dors plus, je ne mange plus et je n'arrive même plus à sortir de mon lit.
Je ne suis pas encore morte, mais je n'ai plus rien de vivant. Ma vie fout le camp et je ne ne sais plus ni à quoi ni à qui me raccrocher pour tenter de me sortir de cette spirale infernale.
Entre deux crises de larmes, je me omplais dans le désespoir, trouvant même un certain désespoir à maudire la terre entière, pleurant sur les échecs et les défaites de ma vie.
Puis, c'est un ménage à trois qui va me permettre de me sentir à nouveau une femme désirée et désirable. Car je vais vibrer de désir pour Roger et mourir d'amour pour Paul.
Roger et Paul. Paul et Roger. Les deux sont amoureux de moi. Mais Paul est marié. Qu'importe, je finis par céder. Aux deux ! Paul est jaloux de Roger qu'il considère comme un batteur de cirque. Roger n'aime pas l'emprise de Paul sur Moi.
Avec Roger, je retrouve la passion des corps que j'avais perdue depuis Daniel. A nouveau, je suis au septième ciel. Enfin, j'ai la fièvre dans le sang et tous mes sens sont en émoi.
Paul me couvre de cadeaux et veut divorcer pour moi. Deux hommes à mes pieds, c'est exactement ce qu'il me fallait pour repartir.
Seulement voilà, un dilemme se pose. Un choix s'impose : entre Roger le ténébreux et Paul le fiévreux, lequel choisir ?
C'est Roger qui l'emporte très vite et vient s'installer à la maison.
Mais il est très jaloux et ça ne marche pas beaucoup.
Je retourne sur la scène de l'olympia avec Julio Iglesias en vedette. j'ai le trac. Et pour assurer le show, je ne veux que lui. Lui, c'est Bob ! Le seul qui connaît sur le bout des doigts l'artiste que je suis. Pour obtenir la perfection, c'est Bob qu'il me faut et personne d'autre. Ô joie, il accepte.
Et Roger, furieux du retour en force de mon ex, me largue pour partir sur les croisières Paquet.
Un cirque ! Voilà ce que ma vie est devenue. Une foire aux sentiments, un bordel aux émotions. Roger me parle d'amour mais oublie le plus important : le faire ! Je suis encore à espérer pouvoir reconstruire quelque chose avec lui, mais déjà nos deux corps ne aprlent plus le même langage : je veux du désir quand lui est dans le pur fantasme. Roger manque de simplicité, ses scénarios sexuels sont trop élaborés à mon goût.
Pourquoi tous ces jeux qui l'émoustillent, alors qu'il suffirait simplement de jouer à s'aimer ?
Désormais, avec lui, j'ai mal et je suis mal, partout : chez moi quand il ne me touche pas et chez lui quand je croise le regard de sa mère, souvent lourd de repproches.
Quand il part, j'ai mal à en crever.
C'est à ce moment-là qu'une voyante me prédit une catastrophe avec ma voiture.
La suite ? Un jour, j'ai la sensation qu'une voiture me suit. Appel de phare, arrêt de la voiture, mon agresseur s'énerve parce que je n'ouvre pas la portière. Il devient hagneux.
Finalement, je cède et ouvre la portière. Il me pousse sur le siège de droite et prend ma place. Je suis tétanisée. Il commence à me toucher. Il défait un à un les boutons de mon chemisier. Il me regarde, me caresse, se faisant pressant.
Parce que je ne prends pas la pilule, je ne veux surtout pas qu'il me pénètre.
Alors je prends l'initiative et lui dit gentiment que je vais m'occuper de lui. Ce que je m'empresse de faire étant donné sa nervosité. Je lui demande de se laisser faire, tout va bien se passer. Cette fois, c'est moi qui suis sur lui.
Je m'occupe de ses fringues et lui fais une fellation.
Je tâche surtout de garder mon sang froid. J'espère le satisfaire pour ne pas le voir revenir à la charge. Une fois son plaisir obtenu, le temps qu'il reprenne ses idées, je m'empresse de prendre une boîte de Kleenex dans la boîte à gants et à vitesse grand V, et je m'en fourre plein la bouche, ni vu, ni connu mais c'est l'horreur !
Lui est aux anges et semble même dans un état second.
Heureux de ce qui vient de lui arriver. Dans l'agitation, je perds une boucle d'oreille et je me mets à la chercher. Comble de l'ironie, mon agresseur la retrouve et me la donne. Puis, il sort un petit calepin, l'ouvre et me demande mon prénom et mon âge. Tout en précissant :
"Quand une femme me plaît, je la note dans mon carnet". Ce qui l'intéresse finalement, c'est son tableau de chasse.
Lorsque j'arrive chez moi, je suis toute débraillée et dans un état catatonique. Je file dans la salle de bains me laver vingt fois les dents.
Pendant longtemps, je me promènerai chez moi avec une brosse à dents à la main. Mon fils veut que j'aille porter plainte. j'irai !
Mais il n'est pas question de faire la Une des journaux à scandale avec une histoire pareille. J'abandonnerai donc les poursuites contre cet inconnu. Pour eux, affaire classée ! Pour moi l'enfer ne fait que commencer...
Pour les amateurs :
Les souvenirs de Georgette Lemaire