"LE SOUVENIR EST UN POETE, N'EN FAITES PAS UN HISTORIEN."
- Recommandation de Mamie -
"Une pensée particulière à Nicolas, Madeleine, Pierre, Stéphane, François-Xavier, Vincent, Asta, Alban, Olivier, Elsa, Milko et Elif, Alberto, Ariane, Khelreddine, Cécile, Thomas, Nick, Lola, Romain, Valentin, Marie et Mathias, Djamila, Manuel, Marie, Nohemi, Thomas, Quentin, Fabrice, Elodie, Victor, Valeria, Renaud, Fabrice, Luis Felipe, Precilia, Manu, Lamia, Maxime, Grégory, Nicolas, Mathieu, Patricia, Thierry, Guillaume, Mohamed, Hugo, Aurélie, Jorge Alonso, Halima, Houda, Emmanuel, Aurélie, Germain, Cédric, Hyacinthe, Christophe, Fanny, Bertrand et les autres... Tous les autres.
Tous les nôtres.
"Une photo, là, sous vos yeux.
Aucun doute à avoir, au premier plan, c'est Lucien Blacquier. Et il n'a pas l'air d'être dans son assiette. Derrière lui, c'est la cohue. Ma Mamie raconte la suite :
"A la récréation, nous jouions à la guerre : les garçons se divisaient en deux camps et nous étions obligés, nous les filles, de faire les espionnes. Comme nous étions immanquablement interceptées par l'un ou l'autre camp, on nous roulait dans le gravier de la cour. J'avais dix ans."
Dix ans. L'âge où les garçons ont des billes plein les poches. L'âge aussi où ils prennent les filles pour des cloches. Les quilles à la vanille et les gars en chocolat comme disait Papi.
Et tout le monde joue. Tout le monde sauf le petit Blacquier.
Regardons-le encore ce morpion avec sa tête de premier de la classe : on l'imagine lever le doigt pour moufter - quand un copain colle un Chewing-gum sous le pupitre - comme tous les fayots qui se respectent.
On le devine bouquiner La chèvre de Mr Seguin - en buvant une limonade à la paille - pendant que ses camarades jouent avec un cerf-volant.
Pas de cabane, ni de sarbacane au menu de la journée du petit Blacquier. Pas le genre de la maison.
Parlons-en de la maison des Blacquier. Un papa qui est vicelard comme pas deux et une maman qui ne vaut pas mieux.
Dans le quartier, tout le monde sait qu'elle se déloquait tous les soirs sur son balcon - et il y avait du monde au balcon, si je peux me permettre l'expression... - devant la caserne des pompiers, qui la zieutaient comme un incendie de forêt. Avec ça, il ne faut pas s'étonner que le petit file du mauvais coton.
Mais revenons à nos moutons - et à la photo -, et posons nous la question : qu'est-ce qui le turlupine à ce point ?
Ouvrons le dossier Blacquier :
Est-ce une mauvaise note ? Une interro-surprise qui lui est restée en travers de la gorge ? La dictée de trop ? Non, non et non, cent fois non.
Si Lucien - "Lulu" - n'est pas bien, c'est pour une raison bien déterminée. Il a déconné...
C'est ma Mamie qui m' a apporté la réponse de la photo sur un plateau. Elle nous lâche le morceau :
"Je me souviens très bien de ce crétin de Blacquier. C'était le voisin de chaise de ma copine Amélie. Un jour, je la trouve en larmes dans les toilettes - à côté des savons jaunes accrochés au mur -, elle m'avoue qu'en classe, Blacquier lui glissait la main dans sa culotte Petit-Bateau en murmurant :
"Si tu dis quelque chose, tu iras en prison parce que mon père est député."
Voilà qui dispense Mamie de bien des explications. Quand même, ce Blacquier, quel toupet !
Inutile d'écrire que quand ma Mamie a appris le fin mot de l'histoire, son sang n'a fait qu'un tour.
Une envie, une seule : en découdre avec ce tordu - qui allait l'avoir dans l'oeuf - et lui foutre une branlée !
Une réaction démesurée ? Pas si sûr.
Il faut la comprendre. Et d'une, elle n'a jamais aimé les députés et de deux, elle n'a jamais pu encadrer le petit Blacquier.
Bref, ni une, ni deux, elle est entrée en classe - en furie - pour empoigner ce peigne-cul de Blacquier, prête à n'en faire qu'une bouchée. Mais c'était sans compter sur l'intervention de la maîtresse accourue pour les séparer.
Dommage, après tout. Mais ce n'était que partie remise parce qu'en allant au coin - avec le bonnet d'âne ! -, ma Mamie a quand même pu lui balancer cette phrase lapidaire :
- Je vais te couper la zigounette Blacquier si tu continues. Et si tu m'cois pas. T'ar ta gueule à la récré !
"Une photo, là, sous vos yeux" :
Lucien ; Marcelle ; Françoise ; Madeleine ; Angele ; Sarah ; Yvonne ; Eléonore ; Fernandel et Raimu ; Antoine et Charles ; Georges ; Plus belle la vie
"Une caricature, là, sous vos yeux.
Et un vieux discours de Pierre Dac - qui n'a rien à voir ! - et pourtant qu'on lit - aujourd'hui... - les yeux embués de larmes :
"Sur la simple pierre de mon frère, sous ses noms, on lit cette simple inscription :
"Mort pour la France."
Voilà, monsieur Henriot, ce qui signifie pour moi, la France."
La suite se passe de commentaire, extrait : "Sur votre tombe, si toutefois vous en avez une, il y aura aussi une inscription ; elle sera ainsi libellée :
"Philippe Henriot
Mort pour Hitler
Fusillé par les Français..."
Bonne nuit, monsieur Henriot. Et dormez bien. Si vous le pouvez..."
Passons et revenons au crayon de Cabu quand il dessine : "C'est dur d'être aimé par des cons."
Dur, très dur.
Seulement voilà - après cette tragédie -, quand s'élèvera autour des tombes toute la douleur du monde ; là, las, on entendra des murmures, des voix puis ce cri :
"Nous sommes tous Charlie."
"Une photo, là, sous vos yeux.
Une photo du panneau de la maison d'accouchement de Carmaux, la suite appartient aux faits divers. Pour la bonne cause, elle est racontée par ma Mamie qui a assisté à la scène quand elle était gamine. On l'écoute religieusement :
"Il va rentrer. Il rentre, de son pas lent et élastique. Heureusement que la sage-femme le suit de près et le met à la porte.
- Allez vous promenez sur le trottoir... quand ça y sera, j'agiterai la lampe à la fenêtre...
Dehors, il regarde déjà les fenêtres. Il ne pense pas à manger. Sans cesse, il tire sa montre. Il lui arrive de parler tout seul.
A dix heures du soir, il n'y a plus que lui sur le trottoir.
Il est monté deux fois. Peut-être trois. Il a écouté les bruits. Il s'est enfui, effrayé, le coeur bouleversé.
Vingt-deux ans. Il vient de finir son paquet de cigarettes - des Gauloises bleues, comme de bien entendu - et il faudrait aller trop loin pour en acheter. Il se dit...
- Si cette femme oubliait d'agiter la lampe !...
A minuit, il n' y a plus personne dans la rue, plus de bus, de voitures, de taxis, plus rien que des pas lointains, des portes qui se referment.
Enfin, la lampe...
Il est exactement minuit et quart - l'heure du Ricard ! -, Bernard s'élance comme un fou. Ses grandes jambes dévorent les escaliers.
- Solange !...
- Chut... Pas tant de bruit...
Il se tait. Il regarde sa femme, puis l'enfant qu'elle porte dans ses bras.
Alors, il pleure.
Il ne sait plus ce qu'il fait, ni ce qu'il dit. Il n'ose pas toucher le bébé qui est tout rouge. Solange sourit faiblement :
- C'est une fille... dit-elle.
Et c'est alors qu'il prononce en pleurant toujours :
- Je n'oublierai jamais, jamais, que tu viens de me donner la plus grande joie qu'une femme peut donner à un homme...
Dans la série "Une photo, là, sous vos yeux" : Lucien Blacquier ; Marcelle ; Françoise ; Angele ; Sarah ; Yvonne
"Une photo, là, sous vos yeux.
Ici une photographie qui a frappé ma Mamie. Elle a tenu à ce qu’elle figure sur cette page.
Regardez-là : un homme enlace - et embrasse - une femme, tout aussi joyeuse que lui. Si ce ne sont pas là des gens amoureux...
"Une photo, là, sous vos yeux.
La photo d'une tombe. Ma Mamie m'a toujours dit : "Il faut voir les gens que l'on aime partir, ici ou ailleurs. Nous sommes censé perdre les gens que nous aimons. Sinon comment pourrait-on savoir l'importance qu'ils ont pour nous ?"
Elle a ajouté, dans un murmure : "Tu sais, tous les matins, pendant plus de cinquante ans, Françoise venait à la maison. C'était la voisine, on buvait le café ensemble. C'était aussi mon amie. Un jour, elle a rejoins les étoiles. Elle m'avait appris à jouer du piano puis elle m'a appris ce que ça fait quand quelqu'un vous manque..."
Mais il y aussi des décès dont on ne se remet jamais vraiment. Un soir de confidence, elle m'a raconté le rapt du bébé Lindberg. Elle a ajouté que le pilote du Spirit of Saint Louis, le vainqueur de l'Atlantique, était devenu, après la mort de son petit garçon, un autre homme.
Au fil des années, le visage de l'homme qu'adora le monde s'était durcit. Que s'il était devenu père d'autres enfants et que même s'il les avait aimés. Il n'avait jamais pu oublier.
Après des années d'errances, Lindberg s'était pourtant remis à croire à la vie. Il avait défendu les oiseaux et les animaux d'Afrique et était revenu à la foi.
Cette foi, ne l'avait-il pas retrouvée dansl'espoir de rejoindre l'ombre légère, celle du petit garçon qui commençait à parler et qui, pour désigner son grand jouet favori, disait élépant au lieu d'éléphant ?
Après m'avoir raconté cette histoire, ma Mamie était livide. Littéralement bouleversée. Je l'étais tout autant. Je savais que de son côté, elle était revenu à la foi dans l'espoir de rejoindre l'ombre légère, celle de sa petite fille qui n'avait pas eu le temps d'apprendre à parler...
Lolita avait quatre mois quand elle a rejoins les étoiles.
Ma Mamie n'a jamais pu oublier.
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