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16 mai 2012 3 16 /05 /mai /2012 00:01

05nnss8k"Victor Hugo et Juliette Drouet.

 

 Juliette fait une toute petite intervention dans la pièce. Une phrase, pas plus. Pourtant, malgré l’exiguïté de son rôle, elle a été remarquée. Par la critique, par le public et par Hugo.

Il est sous le charme.

  Le lendemain soir, ce n’est pas vers la loge de l’actrice principale qu’il se dirige, mais vers celle de Juliette.

Sur ce qui s’est passé ensuite, ma Mamie ne sait rien. Elle est sûre en revanche qu’il y est revenu le soir suivant, et les autres soirs.

 Sûre que, maintenant, il vit dans l’attente de l’heure où il la retrouvera. Juliette ressent avec une ivresse mêlée d’étonnement cette étrange patience d’un homme amoureux : car elle ne doute pas un instant qu’il le soit.

Plus tard, il lui écrira : "Tu sais qu’il y a un mot infini, je te le dis aujourd’hui comme je te l’ai dit pour la première fois le 16 février 1833 : je t’aime."

On commence à y voir plus clair.

 

 Mais les actes ne suivent pas toujours les mots. Etonnement, déception de Juliette. Les hommes qu’elle a connus jusque-là se sont tous montrés beaucoup plus entreprenants !

 Cette timidité est-elle chez Victor l’effet de l’inexpérience ? La question est sur la table mais plus probablement elle représente son ultime hésitation devant l’inconnu.

 Juliette, femme experte, sent qu’il lui appartient de lever les derniers scrupules de Victor. Cette nuit-même, elle lui écrit une lettre qu’il recevra le lendemain chez lui et qui annonce la couleur : "Merci mon bien aimé Victor, de tout le bonheur que tu me donnes. Merci à ta croyance en l’avenir. Il y a déjà entre nos âmes une alliance sainte qui ne peut pas être rompue.  Demain nous sentirons nos deux âmes se toucher sur nos lèvres."

Direct. Très direct.

Or, trois jours vont s’écouler sans qu’il ne se passe rien ! Elle ne comprend pas, elle ne comprend plus.

Elle sait que Victor doit venir la chercher pour l’amener au bal elle passe à la vitesse supérieure :

"Viens me chercher, ce soir, je t’aimerai jusque-là pour prendre patience - et ce soir - oh ! ce soir, ce sera tout ! Je me donnerai à toi toute entière. J."

Difficile d’être plus clair.

 Il est venu. Ils sont là tous les deux, dans le salon. En fait, ni elle, ni lui n’ont envie d’aller à ce foutu bal. Qui a prononcé la phrase qui allait déterminer tout leur avenir : et si nous n’y allons pas ? Elle, sans doute. Elle l’a entraîné dans sa chambre :

"Ce soir, ce sera tout."

Ce fut tout.

 

Huit ans plus tard il lui écrira :

  "T’en souviens-tu ma bien aimée ? Notre première nuit, c’était une nuit de carnaval, la nuit du Mardi gras de 1833. Rien pas même la mort, j’en suis sûr, n’effacera en moi ce souvenir.

"Toutes les heures de cette nuit traversent ma pensée en ce moment, l’une après l’autre, comme des étoiles qui passeraient devant l’oeil de mon âme. N’oublie jamais, mon ange, cette heure mystérieuse qui a changé ta vie. Cette nuit-là, tu as laissé au-dehors, loin de toi, le tumulte, le bruit, les faux éblouissements, la foule, pour entrer dans le mystère, dans la solitude et dans l’amour."

  Emerveillement de la découverte d’un corps et d’une âme. Ivresse, exaltation. Hugo en rajoute une couche, on le lit religieusement :

 "Le 26 février 1802, je suis né à la vie, le 17 février 1833, je suis né au bonheur dans tes bras. La première date, ce n’est que la vie, la seconde c’est l’amour. Aimer, c’est plus que vivre".

 

 Une dernière pour la route : "Je n’oublierai jamais cette matinée où je sortis de chez toi, le coeur ébloui. Le jour naissait. Il pleuvait à verse. De grands cris inondaient le boulevard du temple. ils étaient ivres, et moi aussi, eux de vin, moi d’amour. A travers leurs hurlements, j’entendais un chant que j’avais dans le coeur. Je te voyais, toi, douce ombre rayonnante dans la nuit, tes yeux, ton front, ta beauté, et ton sourire aussi enivrant que tes baisers. O matinée glaciale et pluvieuse dans le ciel, radieuse et ardente dans mon âme !"

 

 De cette nuit, elle et lui sont sortis éblouis.

Dans les bras de la femme aimée, il a connu des plaisirs jusque-là ignorés. Il s’est étonné de ses propres dons restés - si longtemps - assoupis au creux du lit conjugal.

Cinquante années d’amour viennent de commencer. Cinquante années !

 

 L’homme qui, à l’aube regagne l’appartement endormi de la place Royale sait-il vraiment où il va ? Et elle qui, au fond d’un lit redevenu solitaire, garde dans le coeur et sur le corps la trace de tant de baisers brûlants ?

 En effet, comment douter qu’il y ait là de l’amour et du meilleur ? 

 Rien ne manque à cette liaison qui s’engage, pas même la jalousie.

Et celle-ci vient, non de Victor, mais de Juliette. Il lui a dit vouloir se rendre à un bal - encore un - sans elle. Elle n’en accepte même pas l’idée qui la rend folle. D’où un véritable ultimatum : "Si vous ne me répondez, d’ici à minuit, je comprendrai que vous tenez peu à moi... et que tout est fini... et à tout jamais."

 On se réconcilie : comment pourrait-il en être autrement ?

C’est au tour de Hugo d’être jaloux, il demande des comptes. Réponse de Juliette : "Dieu m’est témoin que je ne t’ai pas trompé dans notre amour une seule fois depuis quatre mois..."

 Je ne sais pas vous cher lecteur mais moi je trouve qu’il y a trois mots de trop : "dans notre amour".

Juliette établit une différence très nette entre le don de son corps sans plaisir et l’offrande totale : très exactement la distinction que font les courtisanes. Victor, lui, la veut toute à lui. A lui seul. A Juliette, il demande tout et n’offre rien - que son amour.

Cet étrange marché, parce qu’elle l’aime d’un amour plus fort que la raison, Juliette va l’accepter.

 Alors la question que tout le monde se pose, Juliette a-t-elle cru un moment que Hugo quitterait tout, et d’abord Adèle, pour elle ?

Ma Mamie l’ignore.


 En tout cas, elle est formelle quand elle avance qu’à aucun moment - elle dit bien : à aucun moment - l’idée n'est venue à Hugo de vivre avec Juliette.

Dans les bras de Juliette, il retrouve quelque chose de capital qui n’est rien de moins que son identité. De nouveau, il peut croire en un avenir. Et puis, il ne faut pas oublier toutes ces scènes épuisantes.

 C’est qu’elle n’est pas facile à vivre, Juliette !

Malgré ces tempêtes, Hugo ne brisera rien. Jamais.

Perdre Juliette ! Cette seule idée lui fait monter aux lèvres un goût de cendre et de mort.


 Mieux : même au plus fort de son amour pour Juliette, il ne cessera jamais d’aimer Adèle. Il l’aime différemment, voilà tout.

Mais il a besoin de sa douce présence dans la maison, de cette connivence qui fait une famille, d’habitudes devenues une autre nature. Il aime Juliette, mais il a parfaitement conscience qu’une séparation d’avec Adèle lui serait un intolérable arrachement.

 Donc il n’y pensera pas.


 Leurs rencontres - et leurs étreintes - ont lieu dans la rue de l’Echiquier.

Chez elle. C’est là qu’éclatent des scènes de plus en plus violentes.

Elle a du caractère Juliette !

Un jour qu’Hugo a vraiment dépassé les bornes, elle a couru, après son départ, à la coiffeuse où elle enfermait les lettres de son amant et les a déchirées en mille morceaux. Après quoi, elle les a brûlées. L’apprenant, Hugo est au désespoir : ces pages, il estimait qu’elles contenaient le meilleur de sa prose.

Quelle perte pour la postérité !

Même en amour, l’écrivain se garde d’oublier son oeuvre.


 On se dispute. On se réconcilie sur l’oreiller. Humiliée, elle s’en veut d’avoir cédé : "Je vous demande pardon d’avoir consenti à vous appartenir, après ce qui s’était passé entre nous". Elle l’injurie, pleure, sanglote, puis se jette dans ses bras. Ce qu’ils sont, au cours de tous ces premiers mois : de merveilleux amants, mais des amants terribles.

 Au tumulte succède des moments de bonheur absolu.

Ce qui les lie encore, c’est que le sentencieux Victor s’est, tout à coup, et sans que rien n’annonce ce changement, senti redevenir un adolescent. En un instant, il perd ses airs graves pour retrouver la gaieté d’une enfant. Et bien sûr, cela s’achève au lit. Ce qui n’empêchera pas le lendemain une nouvelle scène et, tout à coup, la furieuse et solennelle promesse de ne plus se revoir. 

Jamais.

 

Victor à Juliette : "Croire, espérer, jouir, vivre, rêver, sentir, aspirer, sourire, soupirer, vouloir, pouvoir, tous ces mots-là tiennent dans un seul mot : aimer. De même ma Juliette, tous les rayons du ciel, ceux qui viennent du soleil, ceux qui viennent des étoiles sont mêlés dans un regard de toi !"

 Quelques jours plus tard, il oublie de venir à un rendez-vous et derechef Juliette crie sa colère et son chagrin :

"Il est bien évident que vous ne m’aimez plus. Adieu, pensez à moi sans amertume."

 Il accourt, il l’étreint, elle oublie.

 

 Le problème c’est qu’Hugo ne se montre pas aussi empressé au lit qu’elle le souhaiterait. Elle qui n’a jamais boudé les plaisirs du corps, proteste alors : "Je vous désire. Si vous aviez l’esprit d’en profiter, mais vous êtes plus bête qu’un bonhomme en pain d’épice et vous n’êtes pas même bon à être mis en loterie".

 Le 13 juillet 1835, elle protestera contre "la loi de chasteté que vous observé si rigoureusement avec moi". Et encore : "Je vous assure, plaisanterie à part, mon cher petit Toto que nous nous conduisons d’une manière tout à fait ridicule. Il est temps de faire cesser le scandale de deux amoureux vivants dans la plus atroce chasteté." Elle le poursuit de façon aussi drôle que charmante :

"Mon cher petit Totot, vraiment tu devrais venir, ne fût-ce que pour voir l’effet que cela me ferait."

 En revanche, quand elle le retrouve, c’est l’ivresse dont elle ne songe jamais à limiter l’expression :

"Je trouve que six heures passées dans les bras l’un de l’autre valent plus d’un siècle en omnibus. C’est mon opinion, et toi ?"

 Et lui n'en pense pas moins...

 

Collection Mamie raconte Hugo :  Victor et Léonie ; Victor et Juliette ;  Victor et Adèle se marient ;  Victor et Adèle ;  Les châtiments de Mamie ;  L'éveil du petit Hugo

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Published by Régis IGLESIAS - dans Mamie explore le temps

Livre d'or

Première affiche

 

  "MA MAMIE M'A DIT"  

Spectacle nostalgique 

 

"On nous avait promis la magie, promesse tenue : un spectacle plein de féérie de souvenirs où chacun se retrouvait. Une belle énergie. Les résidents ont adoré. Merci." Marie ("La Clairière de Luci" - Bordeaux)
 
"Formidable ! Nous sommes tous remontés dans le temps, nous avons vingt ans, on a ri, on a presque pleuré et surtout on a chanté. Merci." Cathy (Arles)
 
"Un véritable petit chef d'oeuvre" ; "La légion d'honneur pour la créativité" "Un véritable artiste" ; "Après-midi formidable" ; "Absolument parfait" ; "Une rétrospective originale" ; "Un très bon moment d'évasion". Propos recueillis à la résidence Emera d'Angoulême  
 
"Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux... C'était magnifique. Nous avons revu toute notre jeunesse et notre enfance. Et c'est beau de redevenir jeune dans l'ambiance d'autrefois." Aimée et Janine
 
"Les chansons, les réclames et les anecdotes ont transporté les résidents dans leur enfance. Une après-midi de nostalgie mais aussi de chansons et de rires. Merci encore pour ce magnifique spectacle." Sandrine
 
"Spectacle complet, tellement agréable et thérapeutique pour nos personnes âgées, encore félicitations !" Docteur Souque
 
"Un choix extraordinaire de chansons, des moments magiques, des photos magnifiques, vous nous avez mis de la joie dans le coeur. Et retrouver sa jeunesse avec tous ces souvenirs, ça fait plaisir et j'espère que vous reviendrez nous voir." Mme Lorenzi (Juan-Les-Pins)
 
"Pour ma fête, par un pur hasard je me suis retrouvé dans un club de personnes âgées où j'ai pu assister à votre spectacle sur le passé. Cela m'a rappelé mes grands-parents et mes parents et c'était vraiment un moment magique." Josette, La Roque d'Antheron
 
"Bravo bravo bravo Regis, c'est le meilleur spectacle que j'ai vu depuis que je fais le métier d'animatrice." Bénédicte La Salette-Montval (Marseille)
 
"Je n'imaginais pas lorsque je vous ai accordé un rendez-vous que vous enchanteriez pendant 1 h 1/4 les personnes âgées d'une telle façon. Merci pour votre prestation qui a fait revivre les moments publicitaires, évènementiels et musicaux de leurs vies." Michelle, CCAS de Toulouse
 
"Un super voyage dans le temps pour le plus grand plaisir des résidents. Merci à Régis pour cette magie et à bientôt." Brigitte (Lunel)
 
"Enfin un retour à notre "époque". Quel bonheur, que de souvenirs, quelle belle époque ou l'amitié était de mise. Merci pour cette très belle après-midi, on s'est régalé avec ce très très beau spectacle". Danielle (Mirandol)
 
"Super - divinement bien -  tout le monde était enchanté même que M. Benaben a dit : "Vous nous avez donné l'envie de revivre notre vie"." Sylvie (Sainte Barthe)
 
"Un grand merci pour ce bon moment et je crois, je suis sûre, qu'il a été partagé par mon mari." Mme Delbreil
 
"Une féérie de l'instant." Christian
 
"Beaucoup d'émotion dans ce spectacle plein de chaleur et d'humanité." Sylvie
 
"Une soirée inoubliable. Continuez à nous émerveiller et faites un long chemin." Claude
 
"Le meilleur spectacle que j'ai jamais vu. De loin." Tonton Kiko
 
"C'est bien simple, je n'ai plus de Rimmel !" Claudine (seconde femme de Tonton Kiko)
 
"A ma grande surprise, j'ai versé ma larme. Tu as atteint mon coeur. Bravo pour ces sentiments, ces émotions fortes, j'ai eu des frissons par moment." Ta couse Céline
 
"Redge, encore un bon moment passé en ta présence. On était venu plus pour toi que pour le spectacle, mais quelle agréable surprise ! On est fier de toi, continues d'oser, de vivre !" Pascale
 
"J'avais froid, un peu hagard, l'humeur moribonde et puis voilà, il y a toi avec toute ta générosité, l'intérêt, l'affection que tu as toujours su apporter aux autres, à moi aussi et Dieu sait si tu m'as rendu la vie belle depuis qu'on se connaît comme tu as su le faire une fois de plus." Jérôme
 
"Ce spectacle est nul à chier et je pèse mes mots." Gérard
 
memoria.viva@live.fr

Ma Mamie m'a dit...

Madka Regis 3-copie-1

 

COLLECTION "COMEDIE"

Mamie est sur Tweeter

Mamie n'a jamais été Zlatanée !

Mamie doit travailler plus pour gagner plus

Mamie, tu l'aimes ou tu la quittes

"Casse-toi pauvre Régis !"

Papi a été pris pour un Rom

Mamie est sur Facebook

Papi est sur Meetic

Il y a quelqu'un dans le ventre de Mamie

Mamie n'a pas la grippe A

La petite maison close dans la prairie

 

COLLECTION "THRILLER"

Landru a invité Mamie à la campagne...

Sacco et Vanzetti

Mamie a rendez-vous chez le docteur Petiot

La Gestapo française

Hiroshima

 

COLLECTION "SAGA"

Les Windsor

Mamie et les cigares du pharaon

Champollion, l'homme qui fit parler l'Egypte

Mamie à Tombouctou

 

COLLECTION "LES CHOSES DE MAMIE"

Mamie boit dans un verre Duralex

Le cadeau Bonux

Le bol de chocolat chaud

Super Cocotte

Mamie ne mange que des cachous Lajaunie

 

COLLECTION "COUP DE COEUR"

Mamie la gauloise

Mamie roule en DS

Mamie ne rate jamais un apéro

Mamie et le trésor de Rackham le Rouge

 

COLLECTION "DECOUVERTE"

Mamie va au bal

La fête de la Rosière

Mamie au music-hall

Mamie au Salon de l'auto

 

COLLECTION "SUR LA ROUTE DE MAMIE"

Quand Papi rencontre Mamie

Un Papi et une Mamie

Mamie fait de la résistance

Mamie au cimetière

24 heures dans la vie de Mamie

 

COLLECTION "MAMIE EXPLORE LE TEMPS"

Jaurès

Mamie embarque sur le Potemkine

Mamie et les poilus

Auschwitz

 

COLLECTION "FRISSONS"

Le regard de Guynemer

Mr et Mme Blériot

Lindbergh décroche la timbale

Nobile prend des risques

 

COLLECTION "MAMIE EN BALLADE"

Mamie chez les Bretons

Mamie voulait revoir sa Normandie !

La fouace Normande

La campagne, ça vous gagne...

Mamie à la salle des fêtes

Launaguet

La semaine bleue

Le monastère

 

COLLECTION "MAMIE AU TEMPS DES COURTISANES"

Lola Montès

Les lorettes

Mme M.

Napoléon III

Plonplon

La marquise de Païva

Mme de Pompadour

Générique de fin