"Messieurs rêvent...
Lorsqu'il arriva au Caire, Carter débordait d'enthousiasme. il n'avait que vingt ans. Il eût été incapable d'exhiber le moindre diplôme en archéologie. On reçut donc avec quelque condescendance ce personnage falot.
Il en débarquait tant, armés comme lui de leurs seules illusions ! Or ce même Howard Carter allait découvrir un jour le tombeau de Tout Ankh Amon.
Il devint - chance extraordinaire - l'assistant de sir William Flinders Petrie.
A un témoin peu perspicace, Howard Carter apparaissait comme le plus effacé des collaborateurs de Petrie.
Paralysé par la timidité, il n'ouvrait la bouche que si on l'en priait à plusieurs reprises.
Rien ne l'enchantait davantage que de passer inaperçu. Un simple tâcheron ? Quelle erreur !
Bientôt, les hiéroglyphes n'eurent plus de secret pour lui, non plus que la langue des pharaons. Il avait tout appris des méthodes de fouille et des analyses historiques qui devaient en découler. L'autodidacte deviendra alors archéologue officiel. Cela ne dura pas.
Étant intervenu pour mettre fin à une obscure bagarre au cours de laquelle un voyageur français avait été molesté, Carter se vit exiger des excuses. Il refusa tout net, manifestant déjà ce caractère ombrageux dont le monde entier parlera un jour.
A regret, Maspéro dut le relever de ses fonctions.
Tristes années que celles qui suivirent.
Pendant quatre ans, Carter dut, pour survivre, vendre des aquarelles aux touristes, voire se faire guide. Son seul plaisir était de traverser le Nil et d'aller visiter cette vallée des Rois qui, comme Mamie, le fascinait.
Les pharaons s'étaient fait enterrer dans la vallée des Rois pendant cinq siècles. Cinq siècles ! "Dans toute l'histoire du monde, écrira Carter, il n'est certainement pas un autre coin de terre qui ait à raconter un demi-millénaire plus riche en évènements pittoresques."
En apparence, toutes les tombes avaient été retrouvées et pillées. Existait-il quelques apparence que l'une d'elles eût échappé à la vigilance des pillards et des archéologues ? C'était bien improbable.
Carter n'en continuait pas moins de rêver.
De temps à autre, Maspéro demandait des nouvelles de Carter.
Il s'attristait de le savoir toujours pauvre et surtout, inutilisé. Un jour il le fit venir dans son bureau. Là, se trouvait un homme distingué. A l'instant, Howard Carter sut qu'il avait affaire au comte de Carnarvon.
Ce qu'il ne savait pas en revanche, c'est que cette présentation venait de sceller son destin.
Carnarvon appartenait à l'une des plus notables familles d'Angleterre. A l'âge de vingt-neuf ans, il s'était marié. Lady Carnarvon lui avait donné deux enfants, un fils et une fille. Dès que l'automobile fit son apparition, il en acquit une.
Il trouvait cela d'une suprême élégance.
Un très grave accident vint très vite le détromper. Il en sortit la cage thoracique enfoncée, les jambes cruellement brûlées, les maxillaires facturées et les bras démis. Il resta aveugle pendant un laps de temps qui plongea son entourage dans l'angoisse.
Sa convalescence s'éternisant dans les brouillards anglais, son médecin lui conseilla d'aller se refaire une santé en Egypte. Il s'embarqua en 1903.
Comme dit Mamie : lui aussi venait de choisir son destin...
A peine arrivé, il se prit de passion pour les sites et monuments égyptiens. Il voulut tout savoir de cette civilisation disparue et fascinante. Après trois ans de curiosité un peu désordonnée, il résolut de passer à l'action.
Il engagea une équipe et pendant des semaines creusa un peu au hasard. Son mérite ? S'être rendu compte qu'il n'arriverait à rien sans l'aide d'un spécialiste. Maspéro lui conseilla Howard Carter.
Pour Lord Carnarvon, un avis de Maspéro était un ordre. Il obtempéra.
Ce qui les unissait : la passion de la recherche. Ce qui les opposait : la dépendance où ils aller se trouver l'un de l'autre.
Carter aurait voulu fouiller seul mais il avait besoin de l'argent de Carnarvon. Le noble lord aurait voulu s'attribuer seul le mérite des découvertes, mais il savait qu'il ne pouvait se passer de la science de Carter.
Ils fient quelques découvertes. Mais rien de bien méchant.
Le tombeau d'un certain Teta-Ky avec quelques babioles. Pas grand chose mais la preuve était faite néanmoins de la compétence de Carter.
Désormais, Carnarvon lui accorda une confiance presque absolue.
Or la véritable obsession de Carter était la tombe de Tout Ankh Amon...
Tout Ankh Amon : découverte d'un trésor
Mamie et les cigares du pharaon
Howard Carter et le conte de Carnarvon