"Au fil du vent.
Avertissement : Ma Mamie m'a toujours raconté des histoires avant de dormir. D'abord, ce fut l'histoire sur la chèvre de M. Seguin puis - de fil en aiguille, elle m'a ensuite raconté des histoires sur l'Histoire.
Et c'est grâce à ces - belles ou terribles - histoires que j'ai appris que pour passer du ciel à l'enfer, il suffit juste de tourner le dos.
Vous retrouverez ici-bas toutes les histoires de ma Mamie. Morceaux choisis :
La première histoire - comment oublier ? - était sur l'aventure incroyable vécu par entre un homme qui rêvait de voler et sa femme prête à tout pour que son mari réalise ses rêves. Mr et Mme Blériot (Un officier monte à bords, salue Alice dont les lèvres tremblent. "Je vous présente mes félicitations madame." Alors, elle pleure.")
J'étais encore bouleversé par cette histoire que Mamie a enchaîné avec le destin tragique de Mata-Hari qu'on ne présente plus et dont ma Mamie a pu suivre à la trace avant de mener l'enquête...
Ce n'est qu'ensuite, plus tard - donc trop tard ! -, qu'elle s'est enfin confiée sur son rendez-vous avec le docteur Petiot. A un moment mal choisi par dessus le marché, vu qu'à ce moment-là j'étais en plein tournage du film sur la vie de Jaurès.
Et comme si la coupe n'était pas assez pleine, il a fallu qu'elle en rajoute une couche et qu'elle me raconte - sans m'épargner aucun détail ! - la fameuse journée où Landru a invité ma Mamie à la campagne en août 44, l'année où on a commencé à parler du petit Guynemer.
La suite appartient aux faits divers et est relaté en petit et dans les dernières pages des journaux de l'époque trop accaparé à sauver l'honneur de Mme Caillaux alors que les poilus tombaient déjà comme des mouches.
Et Mamie pendant ce temps-là, elle tourne la manivelle après avoir embarqué - de force ! - sur le Potemkine, l'occasion - qui fait le larron... - de goûter ce foutu Bortsch et de raconter aux membres de l'équipage la vie dissolue de Jeanne d'Arc (la plus belle histoire du monde), la légende de Conrad Kilian (un des personnages les plus extraordinaires de notre temps) et le voyage complètement fou de Champollion, l'homme qui fit parler l’Egypte.
A son retour, nous sommes alors en pleine affaire Sacco et Vanzetti.
Et partout dans le monde, des millions d'hommes et de femmes attendent que le bourreau appuie sur la manette. On est alors loin de la guillotine inventée par ce brave Ignace - quel prénom charmant !... - Guillotin.
La suite de ses histoires ? Ca repart comme en 40 avec la fine équipe de la Gestapo française orchestrée de mains de maître par les Bormann (le bras droit d'Hitler), les Eichmann (l'exterminateur) et j'en passe évidemment.
Il n'y avait pas que des Leclerc (le Français le plus populaire de son temps), des Rommel (l'homme qui a su non seulement conquérir l'estime et l'admiration des Allemands, mais la même admiration et la même estime de ses adversaires) et des Jean Moulin (NDRL : "On oublie que les Français criaient Vive Pétain, qu'ils étaient bien planqué à Londres, qu'il n'y avait pas beaucoup de Jean Moulin...").
Et Mamie qui n'en manque pas une décidément décide de passer du coq à l'âne en me racontant tour à tour, je cite sans ordre de préférence, la fabuleuse épopée de Lindbergh (l'homme qui a vaincu l'Atlantique), le destin tragique d'Umberto Nobile (l'homme qui regrette de ne pas être mort sur la Banquise) et la fameuse recherche du trésor du Tubantia (avec Paul Truck à la manette - nom curieux mais parfaitement authentique) ...
Là, las, elle me raconte la découverte de Tombouctou (ville qui n'a jamais été emprunté par les circuits aseptisés des tours-opérateurs), l'histoire d'amour qui a failli renverser les Windsor (l'abdication du roi pour Wallis...), les combines de Basil Zaharoff (comment son ascension a été possible, c'est justement ce que ma Mamie a voulu découvrir).
Que dire aussi de celles de Stavisky (la carrière d'un escroc qui voulait faire des affaires sans travailler), du courage des résidents du fort de l'Alamo (quand les hommes de l'Alamo pensaient que le mot impossible n'était pas Texan), de l'argent de John D. Rockefeller (l'homme le plus riche du monde. Mais comment devient-on l'homme le plus riche du monde, ma Mamie s'est posée la question...).
La reste n'est que littérature. Une littérature riche en évènements croustillants. Imaginez : ce fameux docteur Fuchs (Chaque jour, nous rencontrons dans la rue des centaines de docteurs Fuchs, des gens aussi effacés, dont la carte d’identité porte cette mention : signes particuliers, néant. Et pourtant...) qui a enfanté de la bombe avec les conséquences qu'elle entraîne à Hiroshima (le jour où les hommes, les femmes, les enfants, se sont embrasés, d'un seul coup) et la guerre froide qui en a découlé à Cuba (ne restait-il plus que cela, la prière ? C'est la question que s'est poséz ma Mamie) ...
Dans le même registre - pour les amateurs -, vous pouvez aussi découvrir les histoires extraordinaires de Mamie dans :
Mamie au pays des pieds noirs (des hommes armés jusqu'aux yeux...) ou le fameux Mamie et les cigares du pharaon (dans son enquête et ce dès le début, ma Mamie savait qu'elle n'était pas au bout de ses surprises...) ; sans oublier Guernica (là où nul, depuis Goya, n'a si puissamment, si douloureusement évoqué les douleurs de la guerre) ; L'affaire Philby (et le moment ou Philby est introduit dans la gueule du loup) ; le Ku-Klux-Klan (le nom seul parle à l'imagination de ma Mamie) et Spartacus (l'allure est fière, le regard hardi, c'est tout ce que ma Mamie sait de lui).
Dans les grandes dates de l'histoire, souvenez-vous de Courrières, (le lieu où des femmes, des épouses, des mères qui crient, qui pleurent, qui s'évanouissent attendent affolées un père, un mari, un fils, souvent les trois) ; L'appel du 18 juin (et cette voix qui traverse les océans...) ; de Mamie au pays des Soviets (le crime du siècle selon Mamie) ; de L'assassinat du chancelier Dolfuss (Ma Mamie m'a dit qu'Hitler avait décidé que Dolfuss était un obstacle à l'intégration de l'Autriche dans le Reich allemand. Donc, Dolfuss devait être éliminé) ; de La nuit des longs couteaux (Ma Mamie répète, chez les SA qu'il faut aiguiser les longs couteaux. Origine d'une expression appelée à rester dans l’histoire).
La suite se joue à Sarajevo (avec l'Archiduc qui ne voyait que par les yeux de sa femme) ; de Mamie, archéologue ! (comme dit très justement Mamie : dans le mot armateur, il y a le verbe aimer...) ; de Howard Carter (celui qui voulait choisir son destin)...
Dans un registre plus littéraire, que dire de la dame aux Camélias (Milles souvenirs !) ; Les châtiments de Mamie ("Décidément, ces Hugo ne font rien comme tout le monde !") ; L'éveil du petit Hugo (Merci Muscar !) ; Victor et Léonie (le lecteur peut douter des lettres, comme ma Mamie a douté) ; Victor et Juliette (direct, très direct) ; Victor et Adèle se marient ("L'homme a reçu de la vie une clef avec laquelle il remonte sa femme toutes les vingt-quatre heures.").
Et c'est à ce moment très précis que ma Mamie a décidé de taper un grand coup en racontant tout ce qu'elle avait sur le coeur au sujet de la mort de John F. Kennedy à Dallas (Dallas, "ville de violence et d'hystérie", dit Schlesinger ; "un univers impitoyable", rajoute Mamie) ; de Lee Harvey Oswald (le type même de l'homme qui jamais n'a été bien dans sa peau) ; sans parler de Lincoln (ainsi en emporte le vent où plutôt la folie des hommes...) ; de Henry Dunant ("Paris oui, mais Genève ? Qui aurait cru ?") qui lança la croix-rouge.
Comment ne pas aborder Georg Elser (l'homme qui voulait tuer Hitler), Tout Ankh Amon (Soudain - dixit Mamie -, dans la foule, ce fut le silence) ; du mur de Berlin (la plus grande fête de rue de l'histoire du monde. Pour situer, toujours d'après Mamie, jamais à Berlin on a bu autant de bières !) aussi et de la mort de Staline (Il faisait froid...) pour clôturer le chapitre.
Le chapitre suivant ? une fois n'est pas coutume, il est érotique. Mamie m'a en effet raconté - dans tous les détails - les moeurs du siècle des lumières. J'ai ainsi connu à l'âge de l'adolescence les vies d'Anna Deslions (qui pluma - pour la forme quelques millionnaires) ; mais aussi d'Esther Guimond (méchante comme la galle) ; de Mme M. (quand le monde a fermé sa porte "au nez de la maladroite qui avait oublié de fermer la sienne") ; de Napoléon III ("Quand on laisse un dessert, c'est que l'on court à un autre…") …
Et Plonplon ("Anna, j'ai deux mots à te dire...") ; et la marquise de Païva (le jour où elle augmenta tout naturellement ses tarifs…") ; et Adèle Courtois ("Oh mon Dieu, je suis prête, prenez-moi quand vous voudrez...") ; et Cora Pearl (elle s'appelait de son vrai nom Emma Cruch, on comprend qu'elle en ait changé...) ; et Mme de Pompadour ("Un morceau de roi ») ; et bien sûr Lola Montès (on ne badinait pas du temps de ma Mamie).
La vie des lorettes, en somme.
Mamie a même poussé le vice jusqu'à déballer les anecdotes croustillantes concernant la contesse du Barry (l'ex petite grisette) ; M. de Persigny (brouilles, réconciliations, scènes) ; Rosalie Léon (un mariage insensé) ; La reine Hortense (quand il s'agit des pères de ses enfants, la reine Hortense s'embrouille toujours dans ses calculs..." et de Lucrèce Borgia (Je cite Mamie : "C'était le bordel chez les Borgia").
Et que dire des amours tumultueuses d'Alfred de Musset et de George Sand (des amants qui se déchirent, s'adorent, se séparent, renouent, se torturent, se reprennent, hurlent, veulent mourir et j'en passe évidemment) ; de l'amour de Lady Hamilton et de l'amiral Nelson (Mamie est formelle : tous les deux, ils s'aimaient à la folie).
Et l’amour qui rime avec toujours quand Benjamin Constant rencontre Mme de Staël, ("Ils s'étaient voués leurs vies !") ; la vie d'Honoré de Balzac et d’Evelyne (Elle sera sa "rose d’Orient", son "étoile du Nord" ou sa "Fée des tilleuls". Il sera son "Loup"...) ; la folle histoire de Mélanie Waldor (La salle est pleine. Alexandre promène son regard parmi le public. Soudain, il rencontre celui d'une jeune femme qui se garde de baisser les yeux...) ; sans oublier la vie sexuelle d'Alexandre Dumas qui a bousculé les codes de l'ancien régime.
Toute une histoire, en somme.