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22 novembre 2014 6 22 /11 /novembre /2014 14:43

4d37037e"A m'en déchirer le coeur.

 

 C'est dans un trois pièces chic et cossu de la capitale que s'est déroulée une des scènes les plus sordides de ma vie.

Ce jour-là, Bob me ramène chez moi, Daniel lui a donné rendez-vous...

 Connaissant le caractère explosif de mon mari, Bob me demande d'attendre dans la voiture et préfère monter s'expliquer seul avec lui. Une sacrée surprise l'attend dans l'apaprtement : Daniel assis calmement dans le canapé du salon avec une carabine avec la main et une bôite de cartouches posée sur la table.

 Il renvoie Bob me chercher, car il souhaite que j'assiste à la scène. Je monte. Et, parce que je suis morte de trouille, je le provoque bêtement : "Vas-y Bob, rentre, n'aie pas peur. Tu ne crains rien, il n'osera jamais tirer..."

 Daniel est tenu par une colère froide.

- Tu sais Bob, je préfèrerais aller en taule pour meurtre plutôt que de te voir aprtir avec ma femme".

Terrorisé, Bob tente de aprlementer, de le raisonner pour éviter le drame ! Finalement, c'est moi qui vait mettre le hola à cette mascarade. Une fois encore, Daniel me demande de choisir et cette-fois, je joue le tout pour le tout, lui avouant que tout est fini entre nous.

 C'est Bob que j'ai choisi ! Pourtant, à cette minute, je suis encore très amoureuse de Daniel. mais si je peux vivre sans Daniel, je ne peux plus chanter sans Bob.

 Quelques minutes plus tard, je me retrouve dans la voiture de Bob, je sanglote comme une madeleine. Cette fois, je sais que tout est fini avec Daniel. Il n'y aura pas de retour possible. C'est trop tard.

 

 Daniel aura beaucoup de mal à s'en remettre. mais l'amour, ça fait toujours mal non ?

Quant à moi, mon choix est fait. j'ai définitement tourné le dos à mon enfance, à ma jeunesse, à mes années d'insouciance. En disant adieu à Daniel, j'accepte enfin de grandir et de pénétrer dans le monde mystérieux des adultes.

 Bien mal m'en a pris.

 

 C'était peut-être trop fort, trop grand, trop vrai pour durer. Aujourd'hui avec le recul et la sagesse de mes soixante-six ans, je sais que ça n'aurait jamais pu marcher sur le long terme.

Mais il n'y a pas un jour où je n'ai pas pensé à lui. Il n'y a pas un jour où il ne m'a pas manqué. Avec lui, je vivais mes rêves. Quand je l'ai quitté, je me suis contenté de rêver ma vie. Je ne l'ai jamais oublié et au plus profond de moi, je garde au chaud le souvenir de nos étreintes, la force de nos soupirs d'enfants, le murmure de nos souffles adolescents.

 

 Avec Bob, c'est la grande vie qui commence.

Je vais mettre des mois à aimer Bob. Un amour qui va complètement m'aliéner et me rendre folle.

 

 En attendant, c'est juste la folie des tournées et je l'impose sur toutes les dates quitte à le payer plus cher qu'un autre pianiste de peur qu'il me lâche. je le couvre de cadeaux : une guitare, une moto, une BMW, rien n'est trop beau pour le musicien de mon coeur.

 Nous nous sommes mariés en février de cette même année. Un mariage qui a bien failli ne jamais avoir lieu.

 En effet, alors que je suis en train d'essayer ma robe de mariée dans une boutique parisienne, deux flics me demandent de les suivre au poste de police : là on m'annonce que Bob  vient d'être arrêté en compagnie d'hommes et de femmes, en plein bois de Boulogne.

 Il est directement incarcéré à Fresnes et moi, je suis dans tous mes états.

C'est Eddy Marouani qui me sauve la mise avant de me coller deux claques et de me dire : "Mais Georgette, réveill-toi un peu, retourne avec Daniel tant qu'il est encore tant et laisse tomber ce Bob, ce n'est pas un homme pour toi."

 Sauf que depuis notre divorce express, Daniel est sur les routes des tournées à fricoter avec tout ce qui bouge - y compris mon ancienne secrétaire Annick - et moi je suis déjà enceinte de Bob.

 Et puis, on ne se refait, c'est moi la femme de tous les extrêmes etd e toutes les passions. Excessive en tout et surtout en amour.

 Je paye une fortune pour le faire sortir. le jour de sa libération, je l'attends devant Fresnes avec, en guise de cadeau de sortie, une magnifique montre de plongée achetée sur les Champs-Elysées.

 

 Quelques semaines plus tard, c'est donc moi qui conduit la BMW jusqu'à l'église de Nogent (Bob n'a plus de permis car il a renversé accidentement un piéton). Signe flagrant d'un désastre annoncé, le jeune marié a oublié les alliances. Dans ma robe bleu ciel, je me dis que tout est encore possible alors que je suis déjà passée d'un doux rêve à la dure réalité.

 Très vite, notre couple va devenir un duo infernal. Une sorte de Liz taylor et Richard Burton dans La mégère apprivoisée. On passe notre temps à se disputer comme des chiffoniers.

 Et il va trouver un moyend e chantage imparable pour me destabiliser et me faire céder : dès que quelque chose ne lui convient pas, il refuse de m'accompagner sur scène.

 C'est bien simple, je crois que Bob est l'homme qui m'aura le plus fait pleurer. Celui qui m'aura le plus torturé. Je suis harcelé moralement. Et la plupart du temps pour des broutilles.

Et puis, je l'avoue, je suis jalouse terriblement. Je suis même très exclusive. Oui, je suis jalouse, mais croyez bien que j'ai des raisons de l'être. Car mon cher et tendre prône l'amour libre. Libre d'aimer qui l'on veut, quand on veut, où l'on veut. Mais moi, je suis de la vieille école : difficile d'aimer sur le mode pluriel. Difficile de faire l'amour sans amour.

 Pire : je réalise vite que les nounous de mes enfants passent plus de temps dans le lit de mon mari que dans la nurserie. Eh oui, monsieur a le culot de faire vivre ses maîtresses sous mon toit.

 La totale !

 

 Là-dessus, pour sauver notre couple, Bob ne trouve rien de mieux pour pimenter notre couple que d'avoir désormais une sexualité libre !

 Quand on rentre de gala, il veut systématiquement par le bois de Boulogne. Là, il arrête la voiture et me demande de dégraffer mon soutien-gorge. Ca l'excite de voir des inconnus mater les seins de sa femme.

 Un soir, Bob m'offre la surprise du chef : à défaut de m'emmener dîner au restaurant, il me propose une soirée coquine dans un club !

 Pourquoi pas ?

 

 Quand j'arrive, on me demande de me déshabiller. Je suis interloquée, sidérée. Bob m'explique dans un grand sourire que nous allons tester l'échangisme ! Une méthode formidable, paraît-il, pour éviter les pièges de la routine et l'usure du temps.

 C'est ce soir-là que j'ai perdu toute confiance en Bob.

 

 Suite à une ènième dispute, Bob quitte la maison sans ne plus donner signe de vie. Au bout d'un mois, son pote m'apprend qu'il vit dans le sud. Je décide d'aller le retrouver, bien déterminé à le récupérer. Sauf qu'en arrivant, je découvre que Bob s'est remis en ménage avec son ex, qu'il avait justement quittée pour moi, et qu'il n'est pas question pour lui de reprendre la vie commune à mes côtés.

 Je rentre à Paris, dévastée par le chagrin.

 

 Deux ou trois jours plus tard, le téléphonne sonne : c'est à nouveau Bob ! Bob qui regrette, qui veut rentrer au bercail. Il me supplie de lui donner une seconde chance. et me promet de repartir à zéro, me jurant ses grands dieux que cette fois, tout sera différent.

 A votre avis, qu'ais-je fait ?

 

 Fin 71, je joue dans une comédie musicale de Francis Lopez, intitulée Restons françaises où je donne la réplique à Gérard Barray. Je suis à la fois actrice et chanteuse.

 Mais l'expérience s'avère difficile pour moi. Entre mon texte d'actrice et mes chansons, ma mémoire me fait défaut. Sans compter la fois où je reste dans ma loge, oubliant mon entrée sur scène.

 Je finirai la pièce en partageant mon rôle avec une autre actrice. 

 

 Direction la Corse. Bob jure m'avoir décroché un contrat dans une grande salle. Seulement, en arrivant sur place, la salle est vide et surtout, il n'y a personne pour nous payer. Pour amortir les billets d'avion, Bob me fait chanter dans un bar perdu en plein maquis. A défaut d'une loge d'artiste, je me change en catastrophe dans une caravane et en guise de scène, je dois me contenter de monter sur un billard.

 Au retour, je refuse de prendre l'avion et je supplie Bob de louer une voiture pour rentrer. Bob éclate de rire en me disant : "Georgette, on est sur une île".

 Je vais faire ma première croisière. Je suis malade pendant toute la traversée.

 

 C'est en 1975, année noire, que Bon et moi avons finalement divorcé.

A l'église de Nogent, on s'était promis de s'aimer pour le meilleur et pour le pire. Bob m'aura aimé sans le meilleur et sans lui désormais, j'allais vivre le pire.

 

Pour les amateurs :

Les souvenirs de Georgette Lemaire

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22 novembre 2014 6 22 /11 /novembre /2014 13:17

78dd059a"A m'en déchirer le coeur.

 

 Je ne voulais pas faire carrière même si j'ai une jolie voix et que lorsque j'habitais encore chez mes parents, les voisins adoraient se mettre à la fenêtre pour m'entendre chanter.

"Je m'voyais déjà, en haut de l'affiche" dirait un certain Charles Aznavour, mais ce n'était que des jeux d'enfants où je m'amusais à jouer les reines du music-hall. Et à l'école, je gagnais toujours le premier prix de chant.

 

 Puis, dès l'âge de quatorze ans, je m'arrangeais pour me présenter aux radios-crochets du 14 juillet, place Gambetta. La première fois, j'ai chanté "On a pas tous les jours vingt ans" et je me suis retrouvée ex aequoavec un garçon qui, lui, avait interprété du Richard Anthony.

 Bref, pour moi, chanter, c'était plus une lubie, un passe-temps, quelque chose qui me faisait du bien. Je m'amusais, toute seule chez moi, devant ma glace, avec mon tourne-disque et ma brosse à cheveux en guise de micro.

- Puisque tu aimes chanter, me dit ma belle-mère, au lieu de rester chez toi, fais-en profiter les autres et ça te fera toujours un peu d'argent de poche."

 Voilà comment j'ai commencé, sans le savoir, à en faire mon métier. juste pour le plaisir de chanter du Piaf, du Macias ou du Ferrat. Puis, un jour, tout va basculer !

 Un communiqué à la télé annonce qu'on recherche des candidats pour aprticiper au Jeu de la chance de Roger Lanzac.

Quand j'entends que le gagnant pourra repartir avec des boîtes de jouets, mon coeur de maman fait un bon. Voir les grands yeux de mes enfants s'ouvrir et s'émerveiller devant leurs cadeaux, j'en rêve déjà...

 Le grand jour arrive. Je choisis "La foule" de Piaf, mon idole. Sept jours plus atrd, je suis fidèle au potse avec une nouvelle partition : "L'hymne à l'amour". Et c'est le jackpot !

Le public me veut et me redemande. Je pense que l'histoire va s'arrêter là. J'ai eu ce que je voulais : des jouets pour mes fils. Merci, au revoir, et à la prochaine... Mais le public m'ayant choisie, je dois revenir la semaine suivante afin d'affronter de nouveaux candidats.

 

 C'est sur l'air de "Padam Padam Padam" que je gagne pour la seconde fois consécutive. C'est ainsi que je me retrouve chez le pianiste de l'émisiion afin de répéter "Le dénicheur" pour repasser la semaine d'après. Mais je devrais céder ma place à une autre candidate : une certaine Mireille Mathieu...

C'est bien plus tard que je comprendrais tout ce qui s'est injustement tramé dans mon dos. Mais dé"jà je reprends mon petit bonhomme de chemin... Sans savoir que mon existence est en train de prendre un virage à 180°.

 

 Tout s'accélère parce que France-Soir m'a mise en première page dans ses colonnes et qu'Eddie Marouani me prend sous son aile. Dans la foulée, les maisons de disques commencent à me contacter pour me faire des offres intéressantes et j'accepte de signer chez Philips, trop heureuse de me retrouver dans la même écurie chantante que Sheila.

 Je donne mes premiers galas aux alentours de Saint-Ouen, je chante a capella dans de petites salles de quartier, à peine accompagnée d'un accordéoniste. 

 J'enregistre ensuite "A faire l'amour sans amour", une chanson écrite par Charles Dumont qui deviendra un hymne pour certaines prostituées.

 A l'automne 67, quand Georges brassens m'engage en vedette américaine de son spectacle à Bobino, c'est mon mari qui s'occupe des détails techniques. On s'aime toujours, on a pu surmonter la crise. Rien de mauvais ne peut plus nous arriver. Si j'avais su ce que le destin me réservait, je n'aurais sans doute pas voulu y croire.

 

 Nous sommes alors en pleine vague de Salut les Copains. C'est l'époque des yéyé, des Johnny et des Sylvie. Soit on fait partie de cette petite bande, soit on est méchamment exclu. une véritable secte !

 

 En coulisses, un homme veille à ce que je ne fasse ni trop de bruit ni trop d'éclat. Johnny Stark.

L'homme qui a inventé Johnny hallyday et qui tente à présent de créer Mireille Mathieu, est bien décidé à faire oublier Georgette Lemaire. Je deviens interdite de plateaux à la télévision et d'émissions de radio.

 

 Un jour on me propose un pianiste pour m'accompagné. Bob.

A peine a-t-il entamé le premier morceau que je suis sous le choc ! Envoûtée, hypnotisée. Cet homme m'aurait-il jeté un sort Je me sens comme ensorcelée, totalement séduite !

 Bob trouve d'instainct le bon tempo de toutes mes chansons. Il ressent mes partitions et devine tout du premier coup l'accord idéal, la note parfaite, celle qui me sied le mieux. Je l'avoue, entre luie t moi, c'est un coup de foudre... professionnel ! Quelle naïve je suis.

 Désormais, je ne veux plus que lui à mes côtés.

Et je souhaite le convaincre de poursuivre l'aventure après Bobino. Mais il refuse, prétextant avoir d'autres engagements à honorer.

 Pourtant, quelques temps après, à la maison, le téléphone sonne. C'est Bob ! Qui me fixe un rendez-vous dans un petit hôtel parisien. Je m'y rends ne sachant pas du tout à quoi m'attendre. Et là, il m'annonce qu'il est tombé amoureux de moi.

 S'il arefusé mon offre, c'est parce que qu'il se dit incapable d'être à mes côtés sur scène alors que je suis amriée. Question de décence, Bob me demande de passer la nuit avec lui. Je refuse et lui propose juste de rester avec lui un petit moment.

 Mais Bob n'est pas du genre à s'avouer facilement vaincu. Et me pose cet ultimatum : "Non, c'est la nuit ou rien du tout !"

 Et je reste !

 Aux premières lueurs du jour, au moment de le quitter, je propose à Bob de le revoir régulièrement. Dans ma tête, l'idée a fait son chemin : il sera mon amant.

 

 Je suis choquée, ébranlée, complètement paumée. Je ne sais plus quoi faire. Et je n'ai plus qu'une idée en tête : garder les deux !

 Alors que je suis en pleine tournée avec Alain Barrière en vedette, je suis tiraillée entre Daniel qui commence à avoir de sérieux doutes sur ma fidélité et Bob qui me menace ouvertement de ne plus m'accompagner au piano.

 La tournée s'achève enfin. Le dernier soir, direction Paris, je monte en voiture avec Daniel.

La nuit est profonde, nous sommes en pleine campagne lorsque soudain, Daniel arrête la voiture et me force à descendre.

- Je te laisse sur le trottoir me dit-il. avec un peu de chance, Bob va passer par là et te ramasser...

Et il redémarre en trombe sans même me laisser le temps de riposter.

 

 Je suis mortifiée. Seule au beau milieu de la nature, je suis morte de peur. Mais bientôt Bob arrive et me récupère.

Au même moment, soulagée, je vois la voiture de Daniel revenir en marche arrière et mon mai me sommer de remonter avec lui. Mon orgueil en a pris un coup et je refuse de bouger.

 Daniel demande à Bob de descendre pour aller s'expliquer "entre hommes" un peu plus loin. Je vois Bob se munir de trois gros pavés au cas où les choses tourneraient mal pour lui. Et mopi, je suis là, en larmes, impuissante, prostrée dans cette voiture à me morfondre sur les dégâts de ma vie. Bob a le courage d'avouer qu'il est amoureux de moi et Daniel me demande de choisir. 

 Je n'y arrive pas.

Je ne peux pas. J'aime les deux, je veux les deux : mon premier amour et mon pianiste de génie. Finalement, je remonte dans la voiture de Daniel en leur disant qu'on s'expliquera à Paris.

 

 De retour à paris, j'ai l'impression d'être prisonnière : de Philips, de Daniel, de ma carrière. Je ne contrôle plus rien. Mes pulsions me dominent et m'entraînent sur une pente que je sais déjà vertigineuse et dangereuse.

 Bob sera-t-il mon sauveur ?

Celui qui saura me redonner élan, courage, sensation d'ivresse et d'évasion ? Daniel est-il encore l'homme de ma vie ? Entre nous, n'est-ce pas déjà trop tard ? A force de trop s'aimer, peut-être finit-on par s'aimer mal. S'aimer moins. N'avons-nous pas atteint le point de non-retour ?

 

Vous le saurez au prochain épisode.

 

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20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 16:54

Accordéon"A m'en déchirer le coeur.

 

 Il était une fois, Léone et Paul Kibleur !

Deux êtres que tout opposait, qui n'auraient jamais dû se rencontrer et qui, par la seule force de leur amour, ont su construire à deux un destin, une famille, une union sacrée et indestructible.

 Dire que mes parents étaient fous amoureux l'un de l'autre est un euphémisme !

 

 Tout commence dans un petit café parisien. Nous sommes pendant la seconde guerre mondiale et mon père est un peu la coqueluche du quartier le chéri de ces dames.

 Beau parleur, pour ne pas dire hâbleur, ce très bel homme remporte un vif succès auprès de la gent féminine. Dans les ruelles de Ménilmontant, il est même surnommé l'Américain, car il a les poches toujours remplies. Il se débrouille. Il est devenu le roi du marché noir, le spécialiste de la savonnette vendu sous le manteau. Il a alors trente ans.

 Place Gambetta, mes parents vont se rencontrer et ne plus se quitter. 

 

 C'est ainsi que moi, Georgette Kibleur, vois le jour le 15 février 1943, Verseau ascendant Gémeaux. Moi je dirais plutôt guerrière ascendant malheur.

 

 Au cours de l'hiver 1943, mon père n'avait de cesse de répéter à Léone : "tâche de me faire une fille !". Lorsque je suis née, il était tellement heureux et fier de sa fille qu'il voulut partager ce bonheur avec ses amis.

C'est donc toute son équipe de football qui débarque à la maternité de la clinique rue Pelleport.

 

 Métamorphosé par l'amour de Léone, transformé par ma naissance, mon père devient un autre homme. D'ailleurs dans le quartier, le voisinage le dit souvent : "s'il n'avait pas connu sa femme, Paul aurait fini sous les ponts."

 

 Et moi, sur les trottoirs de Ménilmontant, je mets mes pas dans ceux d'Edith Piaf et Maurice Chevalier.

Cette époque me paraît si lointaine et pourtant, c'est comme si c'était hier ! Je me revois à l'école de la rue de la Bidassoa, assise tout au fond de la classe, à côté du radiateur, car j'ai toujours froid.

Soyons clair : j'ai horreur de l'école. A poart la pause du lait avec le petit gâteau sec. Gloire au président Coty qui avait instauré ce rituel gratuiterment dans les écoles.

 

 Ma soeur rêve de faire sa première communion, tandis que moi, Georgette la dévergondée, je me moque de cette grenouille de bénitier. Et pour cause, pendant les leçons de catéchisemes, j'emporte le magazine Nous deux et entre "Notre père, qui êtes aux cieux" et "Je vous salue Marie", je dévore les romans-photos tout en rêvant de me voir à la place de ces poupées peinturlutées sur papier glacé.

 

 Le dimanche, on mange chez mes grands-parents où à l'issue de chaque déjeuner, grand-mère Louise nous donne de l'argent pour aller au cinéma. C'est l'époque où je suis folle amoureuse de Victor Mature, au point de tapisser un pan entier du mur de ma chambre avec ses photos.

 

 Le reste ? On peut dire que j'ai commencé tôt. Je sais comment faire pour que les garçons me remarquent et me désirent. Ma mère me confectionne de jolies robes et, tandis que je fantasme sur les bustiers de Brigitte Bardot, je rêve déjà de porter comme elle des talons aiguilles vertigineux.

"Remarquez-moi, aimez-moi, trouvez-moi belle", c'est mon leitmotiv de l'époque.

Dans un grand cri d'amour, j'a besoin de plaire et de séduire. j'aime qu'on se retourne sur mon passage. Loin dans l'ombre, je suis déjà à la recherche de la lumière.

 Et pourtant, je ne suis pas exactement comme toutes les filles de mon âge. Je fuis les surprises-parties et leurs danses imbéciles, préférant me faire mbrasser dans l'obscurité des ruelles du quartier.

 Voilà où j'en suis de ma folle adolescence lorsque ma vie va prendre un tournant décisif.

 

 L'homme de ma vie.

Ce jour-là, je traîne avec ma bande de copains. Assis sur un banc, ils attendent leur nouveau chef de bande, que je ne connais pas et qui doit descendre du bus d'une minute à l'autre. Ils veulent me le présenter.

 Le bus arrive et mon regard est tout de suite attiré par une silhouette masculine. "Putain, ce qu'il est beau ce gars-là", voilà ce que je me dis tout de suite. Un électrochoc !

 Un vrai coup de foudre en direct. Et - miracle ! - c'est bien le nouveau chef de la bande. A cet instant-là, plus rien ne compte pour moi, j'ai le regard aspiré par ce beau jeune homme brun et je tombe amoureuse en un instant.

Mieux : j'ai soudain la douce imprssion de voir mon futur en regardant Daniel pour la première fois.

 

 Daniel Lemaire, c'est son nom et je ne me lasse pas de le répéter.

Ca y est, je l'ai trouvé mon Victor Mature.

 

 L'affaire se conclut rapidement : au Cinéma, je ne vois rien du film, trop occupé à flirter. Je suis folle de lui !

Je le suis partout, tout le temps et on s'embrasse comme des fous ! 

 J'ai un homme dans ma vie et pas n'importe lequel : mon homme !

On fait ça parout et tout le temps, au fond des salles de cinéma. Dès que la lumière s'éteint et que le générique défile, on se fait notre propre cinéma et, à défaut de septième art, nous sommes au septième ciel.

 

 Mes parents ne voient pas d'un très bon oeil cette hsitoire qui me dévore. Les punitions et les interdictions pleuvent. Maman me fait vivre un véritable enfer et fait tout pou m'empêcher de voir Daniel et quand je tombe enceinte et que je fais une fausse couche, c'est le drame !

 Seulement voilà, mon "godelureau" comme le prénomme ma mère, j'y tiens. On a beau me dire que ce fils de concierge n'est pas assez bien pour moi, il pourrait être clodo dans la rue que cela ne m'empêcherait pas de me donner à lui nuit et jour.

 C'est bien simple, pour moi, c'est l'homme idéal.

Chaque dimanche, il m'emmène passer la journée au château de Versailles. On pique-nique dans le parc, sur une jolie nappe à carreaux, posée à même le sol.

 Les moments les plus forts de mon existence. Sous le soleil de Versailles, je suis sa reine.

Sur un arbre, il grave nos deux prénoms dans un coeur...


 

 Lorsque je lui demande de choisir entre ses réunions du parti communiste et moi, il me répond sans hésiter : "Toi bien sûr !"

 Je m'empresse donc de déchirer sa carte du parti et d'aller l'enterrer dans le square du Père-Lachaise...

 Ils peuvent tous parler, médire, critiquer, désapprouver, on s'en fout. Les Roméo et Juliette de Ménilmontant vous saluent bien...

 

 Pour Daniel, je suis prête à toutes les folies, toutes les audaces. quand mes parents m'interdisent de sortir, je suis capable de passer par la fenêtre et de rester coincée au-dessus de la gouttière, dans l'unique but de le rejoindre.

 Voilà ce que c'est quand on prive un toxico de sa drogue. Il me faut ma piqûre quotidienne, mon injection de tendresse pour survivre jusqu'au jour d'après !

 Entre nous, c'est physique, presque animal. Je l'ai dans la peau : son parfum, ses baisers, tout me va, sa violence comme sa douceur. C'est l'amour fou, l'amour passion.

 Mais daniel est jaloux. terriblement jaloux, au point de me mener la vie dure. Il faut dire que parfois, je lui donne de bonnes raisons de voir rouge !

 Un autre homme  - qui s'appelle aussi daniel ! - fait également irruption dans ma vie : lui aussi s'appelle Daniel et son père possède un garage à Montbéliard. Je lui tape dans l'oeil dès notre première rencontre et il me fait une cour assidue à grand renfort de cadeaux : pyjamas en soie, bijoux en nacre, rien n'est trop beau pour me conquérir.

 Je le présente à mes parents : le jour prévu, il arrive à la maison avec une bonne bouteille de calva artisanal. Cela suffira pour que mon père l'accepte illico presto au sein de la famille.

 Très vite, ce nouveau daniel se met à aprler fiançailles. Puis me promet un mariage en grande pompe, une fois qu'il aura effectué son service militaire. 

 A ce moment-là, entre les deux Daniel, mon coeur balance vraiment.

 Le premier est un vrai macho qui me fait fondre avec ses mauvaises manières. Un vrai mauvais garçon qui me fait frissonner de plaisir et de désir. Le second est beaucoup plus raffiné et me couvre de cadeaux. dans ses yeux, je sens, je sais que je lui plais.

 Commence alors pour moi un petit jeu malsain où je me faufile, dans la même journée, d'une couche à l'autre, sans jamais trouver le courage d'en choisir un. jusqu'au jour où le père du garagiste me fait suivre : prise sur le fait, la rupture est consommée... à mon grand soulagement ! Car finalement, c'est bien Lemaire, l'homme de ma vie.

 

 Cette fois, j'arrête mes conneries. Daniel semble d'accord pour un mariage avant l'armée. je lui dis : "Je veux un enfant de toi !"

 Et c'est ainsi que dans le cabanon attenant à la loge de sa mère, Yvonne, nous concevons Pascal, notre premier fils...

 

 Mes parents ont compris. Ce mec je l'ai dans la peau et rien ni personne ne me feront changer d'avis. Ils cèdent et Yvonne accepte le mariage.

 Désormais, appelez-moi Lemaire, madame Georgette Lemaire !

 

 Puis Daniel part à l'armée. Et là, las, il me manque à en crever et je lui écrs une lettre par jour. Dès lors, tous les subterfuges sont bons pour nous retrouver d'une manière ou d'une autre.

 Parfois, c'est lui qui vient lors de fausses permissions. D'autres fois, c'est moi qui prend la micheline pour courir me jeter dans ses bras.

 En 63, il est enfin de retour du service militaire. On a alors deux enfants Pascal et Yvan. A l'abri dans nos 12 m2, nous coulons des jours idylliques !

L'appart ? Pas de téléphone, pas de frigo, rien, mais la télé en noir et blanc avec Nounours et le Petit Train.

 Attention ! Pas question de faire pleurer dans les chaumières ou sortir les violons et les mouchoirs. Car cette période de ma vie fait partie des plus heureuses.

 C'est dur mais quand on a que l'amou

 

 Le reste ? Une chose est sûre, il ne m'a pas épousé pour mes talents de cuisinière. Mais bien pour autre chose !

Entre nous, d'ailleurs, c'est toujours aussi physique, électrique. Un regard, un simple frôlement d'épaule et nos deux coeurs, nos deux corps s'embrasent sans jamais s'éteindre vraiment.

 

 A la maison, mes deux garnements se déchaînent. Se prenant en permanence pour Thierry la fronde dans un 12 m2... Imaginez le spectacle !

C'était le temps de l'innocence et surtout de l'insouciance ! Je suis une petite fille qui a voulu grandir trop vite par amour pour un homme. mais quel homme !

 Le jour de sa paye, c'est toujours le même rituel ! Daniel m'emmène au Monoprix, et ensemble nous dévalisons les rayons de lingerie fine. En revanche, pas question de m'offrir ne serait-ce qu'un grain de muguet ! 

 A la place, il préfère m'achetez un allume gaz, le gadget de l'école.

Il n'hésite pas non plus à m'acheter une jolie paire de chaussures ou des porte-jarretelles. Des cadeaux bien plus intéressants et utiles pour la jeune coquette que je suis toujours.

 

 Bien sûr, il y a des enguelades qui sont pafois terribles. Chez les Lemaire, on a le sang chaud ! Daniel est jaloux et j'adore ça, au point de jouer un peu trop les allumeuses.

 Plusieurs fois, nos disputent dans la rue se terminent violemment. Nos réconciliations sur l'oreiller n'en sont que meilleures...

 Tous deux, nous aimons rentrer dans le feu de l'action, laissant de côté les préliminaires, pour un acte sauvagement délicieux. Lui comme moi, nous savons aller à l'essentiel. Il sait exactement ce que j'aime et quoi faire pour me le donner.

 

 J'ai beaucoup de chance, je le reconnais, d'avoir trouvé l'homme de ma vie du premier coup. 

Aujourd'hui, le temps a passé et Daniel n'est plus dans ma vie depuis longtemps, mais lorsque je repense à mes quatorze ans, c'est son sourire que je revois. Ma jeunesse, c'est lui ! Mon passé ne s'inscrit qu'avec lui. Mon enfance ce termine avec lui.

 Daniel, je ne m'en suis jamais remise.

 

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20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 15:17

15a7dm5r"Les années.

 

 Sur la photo d'intérieur en noir et blanc, en gros plan, une jeune femme et un petit garçon, assis l'un près de l'autre. Sa jupe correspond à la mode lancée par Mary Quant. Elle tient par l'épaule l'enfant, aux yeux vifs, l'air éveillé. Au dos de la photo, rue de Loverchy, hiver 67.

 Certainement, une photo du dimanche, seul jour où ils peuvent être ensemble, où, dans les effluves du déjeuner qui mijote, le babil de l'enfant assemblant ses pièces de Lego, la réparation de la chasse d'eau, avec en fond l'Offrande musicale de Bach, ils construisent leur mémoire commune et affermissent leur sentiment d'être, tout compte fait, heureux.

 A cet instant précis, de l'hiver 67-68, sans doute ne pense-t-elle à rien. A part la liste des courses, la vérification du linge, qu'est-ce que tu fais ce soir à dîner.

 Le reste de ses pensées ? La hauteur des trottoirs pour la poussette, l'interdication des Paravents de Jean Genet et la guerre au Vietnam.

 "J'ai peur de m'installer dans cette vie calme et confortable, d'avoir vécu sans m'en rendre compte."

L'appartement, le sommeil à deux, le grésillement du rasoir électrique le amtin, le conte des Trois petits cochons le soir, tout ce qui, quand elle en imagine la perte accidentelle, lui serre le coeur.

 Elle se retourne souvent sur des images de quand elle était seule, elle se voit dans des rues des villes où elle a marché, dans des chambres qu'elle a occupées. Il lui semble que ce sont ses moi qui continuent d'exister là.

 Le passé et l'avenir, en somme, se sont inversés, c'est le passé, non l'avenir, qui est maintenant objet de désir : se retrouver dans cette chambre de Rome, l'été 63.

 Dans un tableau de Dorothea Tanning qu'elle a vu il y a trois ans dans une expo, on voyait une femme à la poitrine nue et derrière elle, une nfilade de portes entrebâillées. le titre était Anniversaire.

 Elle pense que le tableau représente sa vie et qu'elle estd edans comme elle a été jadis dans Autant en emporte le vent, dans Jane Eyre, plus tard La Nausée.

 A chaque livre qu'elle lit, La promenade au phare, Les Années-Lumière, elle se pose la question de savoir si elle pourrait dire sa vie ainsi.

 Entre ce qui arrive dans le monde et ce qui lui arrive à elle, aucun point d'intersection, deux séries parallèles, l'une, abstraite, toutes en informations aussitôt oubliées que perçues, l'autre en plan fixes.

 

 Plus tard les journalistes et historiens aimeraient se souvenir à l'envi d'une phrase de Pierre Viansson-Ponté dans Le Monde quelques mois avant Mai 68, La France s'ennuie !

 

 Mai 1968 ? C'était un printemps pareil aux autres, avec un mois d'avril à giboulées et Pâques qui tombait tard. On avait suivi les JO d'hiver avec Jean-Claude Killy, lu Elise ou la vraie vie, changé fièrement la R8 contre une berline Fiat, commencé d'étudier Candide avec les premières G, ne prêtant qu'une attention vague aux troubles dans les universités parisiennes relatés à la radio. Comme d'habitude ils seraient réprimés par le pouvoir.

 Mais la Sorbonne fermait, les épreuves écrites du capes n'avaient pas lieu, il y avait eu des affrontements avec la police.

 Un soir, on a entendu des voix haletantes sur Europe n°1, il y avait des barricades au Quartier latin comme à Alger dix ans plus tôt, des cocktails Molotov et des blessés.

 Et nous nous reconnaissions dans les étudiants à peine plus jeunes que nous balançant des pavés sur les CRS. Ils renvoyaient au pouvoir, à notre place, ses années de censure et de répression, le matage violent des manifestations contre la guerre en Algérie, La Religieuse interdite et les DS noires des officiels.

 Ils nous vengeaient de toute la contention de notre adolescence, du silence respectueux dans les amphis, de la honte à recevoir des garçons en cachette dans les chambres de la cité.

 Brusquement, le 1936 des récits familiaux devenait réel.

 

 Quand de Gaulle réapparu - où était-il ? on l'espérait parti définitivement - à parlé de "chienlit" d'une bouche tordue de dégoût... 

 

 La suite ? les examens se passaient, les trains roulaient, l'essence recoulait. on pouvait partir en vacances.

 Début juillet, les provinciaux qui traversaient Paris d'une gare à l'autre en bus sentaient sous eux les pavés, remis à leur place comme s'il n'y avait rien eu.

 Mais rien de la planète ne devait nous être étranger, les océans, le crime de Bruay-en-Artois, nosu étions aprtie prenante de toutes les luttes, le Chili d'Allende et Cuba, le Vietnam, la Tchécoslovaquie.

 Le mot principal était "libération".

 

 Les garçons et les filles étaient maintenant partout ensemble, la distribution des prix, les compositions et la blouse supprimées, les notes remplacées apr des lettres de A à E. Les élèves s'embrassaient et fumaient dans la cour, jugeaient à voix haute le sujet de rédaction débile ou génial.

 On expérimentait la pédagogie Freinet. On abandonnait Corneille et Boileau pour Boris Vian, Ionesco, les chansons de Boby Lapointe et de Colette Magny, Pilote et la bande dessinées. 

 L'Attrape-Coeurs et Les Petis Enfants du siècle.

 

Mais est-ce qu'on n'était pas en train de pédaler pas à côté du vélo ?

Penser, parler, écrire, travailler, exister autrement : on estimait n'avoir rien à perdre de tout essayer.

 1968 était la première année du monde.

 

 Apprendre la mort du général de gaulle un matin de novembre plongeait un instant dans l'incrédulité - il était donc immortel à nos yeux - puis on s'apercevait à quel point on l'avait déjà oublié en un an et demi. Sa mort clôturait le temps d'avant le mois de mai, des années loin dans notre vie.

 

 Pourtant, dans la durée des jours, les sonneries du collège, la voix d'Albert Simon sur Europe n°1, la bavette/frites su samedi, Kiri le Clown et Une minute pour les femmes d'Annick Beauchamp le soir, l'évolution restait insensible.

 

 Les hontes d'hier n'avaient plus cours.

La culpabilité était moquée, nous sommes tous des judéo-crétins, la misère sexuelle dénoncée, peine-à-jouir l'insulte capitale. La revue parents enseignait aux femmes frigides à se stimuler jambes écartées devant un miroir.

 Dans un tarct distribué dans les lycées, le Dr Carpentier invitait les élèves à se masturber pour tromper l'ennui des cours. On s'habituait à voir des sexes à l'écran mais on bloquait sa respiration de peur de laisser échapper son émotion quand Marlon Brando sodomisait Maria Schneider.

 Pour se perfectionner, on achetait le petit livre rouge, suédois, avec des photos montrant toutes les positions possibles, on allait voir Techniques de l'amour physique. On envisageait de faire l'amour à trois. Mais on avait beau faire, on ne se résolvait pas à ce qui était hier considéré comme un outrage à la pudeur, se montrer nus devant ses enfants.

 

 On se retournait sur son histoire de femme. On s'apercevait qu'on n'avait pas eu notre compte de liberté sexuelle, créatrice, de tout ce qui existe pour les hommes. le suicide de Gabrielle Russier nous avait bouleversées comme celui d'une soeur inconnue, et nous nous étions indignées de la roublardise de Pompidou citant un vers d'Eluard que personne ne comprenait pour éviter de dire ce qu'il pensait de l'affaire.

 La rumeur du MLF venait à la province. Le torchon brûle se trouvait au kiosque, on lisait La Femme eunuque de Germaine Greer, La politique du mâle de Kate Millett, La création étouffée de Suzanne Horer et Jeanne Socquet avec le sentiment d'exaltation et d'impuissance que procure la découverte d'une vérité pour soi dans un livre.

 

  Réveillés de la torpeur conjugale, assises par terre sous le poster Une femme sans hommes c'est un poison sans bicyclette, on reparcourait nos vies, on se sentait capables de quitter mari et enfants, de se délier de tout et d'écrire des choses crues.

 

 On ne se souveindrait ni du jour ni du mois - mais c'était le printemps -, seulement qu'on avait lu tous les noms, du premier au dernier, des 343 femmes - qui déclaraient avoir avorté illégalement, dans Le Nouvel Observateur.

 

 Il ne fallait pas mourir idiot.

les uns fumaient de l'herbe, vivaient en communauté, s'établissaient comme ouvriers chez Renault, allaient à Katmandou, d'autres passaient une semaine à Tabarka, lisaient Charlie hebdo, Fluide Glacial, L'Echo des savanes, Tankonalasanté, Métalhurlant, La gueule ouverte, collaient des fleurs sur les portières de leur voiture, des posters rouges du Che et de la petite fille brûlée au napalm dans leur chambre, portaient un costume Mao ou un poncho et se mettaient à vivre au sol avec des coussins, allulmaient des bâtonnets d'encens, achetaient des produits Maurice Mességué, allaient voir le Grand Magis Circus, Le dernier Tango à Paris, Emmanuelle, retapaient une vielle ferme en Ardèche, s'abonnaient à Cinquante millions de consommateurs à cause des pesticides dans le beurre, ne portaient plus de soutien-gorge, laissaient traîner Lui sur la table à la discrétion de leurs enfants, demandaient à ces derniers de les appeler par leur prénom comme des camarades.

 

 La suite prochainement.

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16 novembre 2014 7 16 /11 /novembre /2014 20:27

2085093405 1"Jacques Brel. J'attends la nuit". Morceaux choisis :

 

 C'est à Sétif que je suis né le dernier jour de la seconde Guerre mondiale.

Enfant, je me régalais des histoires des pieds Nickelés et des aventures de Bibi Fricotin.

 C'est le souffle rude des premeirs attentats du FLN qui éteignit les bougies de mon dixième anniversaire. Dans la stupeur ce fut la fin de mon enfance, de ma maison, mon école et de mon village.

 C'en était fini des courses folles dans le lit aride de la rivière, des randonnées de naturaliste en herbe dans les grottes fraîches où piaillait un essaim de chauves-sourir.

 L'évasion et la découverte n'existaient plus alors que dans les têtes et dans les livres. Je lisais et relisais Le Tour du monde n 80 jours, les souvenirs d'Albert Schweitzer.

 

 Je savais, depuis le jour où j'ai quitté le quai d'Alger, que rien ne pourrait jamais plus m'appartenir vraiment.

 

 Saint-Dié des Vosges, 1962.

A dix-sept ans, je m'engage dans des études de médecine. Un ami, Christian, le faité couter un 45 tours. C'est du Brel.

Le choc !

 

 Je deviens un passionné de Brel. J'en recherche tous les disques. "Sur la place", "Le Fou du roi"... Dans les magazines, je récolte toutes les photos et interviews le concernant.

 

 "La nuite est fraîche et tendre comme une peau de femme, comme la main d'un ami, comme un avion qui plave vers l'infini. C'est un instant magique qu'il ne faut pas manquer. De l'essence de vie.

 Lorsque tu ne sais pas quoi proposer comme musique à quelqu'un que tu ne connais pas, mets les mazurpas de Chopin. Imparable !

 Qui viendra me dire que la nuit est faite pour dormir, alors que c'est à cet instant que tout s'éveille ? En bateau, on fait des quarts pour mieux voir les étoiles ! Les étoiles ne vivent pas le jour. Le jour, le ciel est bleu vide et fade ; la nuit, il est riche de mille constellations. Comme le disait Cocteau : "La lune est le soleil des statues" ou encore Eschyle : "La lune est l'oeil de la nuit". Elle donne vie à la pierre. Elle ressuscite.

 La nuit est mère de ce que l'on attend... de ce que l'on fuit et pourtant qu'on appelle...

 

 Tous les bourgeois s'éveillent lorsque tu chantes à deux heures du matin dans les rues ; tu réveilles leurs peurs... J'appelle un bourgeois celui qui dort de 22 heures à six heures 30, et sursaute si l'on beugle de joie à 3 heures du matin.

 Pour Brel, la bêtise, c'était le manqued 'inquiétude ; les "il fait beau parce que le soleil brille", les "il fait triste parce qu'il pleut" ; les "je suis heureux parce que j'ai de beaux enfants, une femme qui m'attend et une belle maison" ; les "j'ai un beau manteau, une belle auto..." ; les "aller au lit parce qu'il est l'heure". Des clichés, des lieux communs.

 Un manque d'envie.

 

L'arrivée de Carlos à l'hospital sur l'île ?

- Mais on vient avec toi ! Maddly ! Mon épée, mon armure...

 Entonnant un air de la Tosca, il prend la direction de Papeete.

- Il peut manger et boire, carlos ?

- Même dans le coma, paraît-il !

Il ralentit l'allure, et réfléchit. Puis il s'arrête devant une auberge.

- On ne peut pas arriver les mains vides, non ?

Il decend de la voiture, et s'engouffre avec Madly dans le restaurant. Ils en reviennent cinq minutes plus tard avec deux plateaux de coquillages et deux bouteilles de vin blanc frais, ainsi qu'un panier avec des toasts etd es citrons.

 Tout en rangeant tout cela dans le coffre de la voiture, il me dit :

- Je voulais trois plateaux, et il n'y en a que deux ! Seulement six douzaines d'huîtres !

 Nous repartons.

 

 Brel, l'amitié, le rire, les pinces de crabes et le riesling.

 

 Brel ne supporte pas que les heures de nuit soient des heures perdues. Car il ne veut rien perdre de la vie. Nous évoquons les dernières années de la vie de Boris Vian qui, se sachant malade, avait fait un calcul "d'ingénieux ingénieur" qu'il était.

 Il avait fait l'analyse chronométrée des moments de ses journées : deux heures pour déjeuner et dîner, six heures pour dormir, une heure pour lire les journaux...

 Et Boris Vian s'est dit, après avoir entendu le diagnostic de son cardiologue, qu'il avait un espoir de vie d'environ sept ans. Alors, mathématiquement, il a supprimé de sa vie tous les instants qui n'étaient pas indispensables : "Tout ce qui n'est pas indispensable me devient inutile !"

 Ainsi a-t-il pu écrire en quelques années des romans,d es poèmes, composer et chanter ses musiques la nuit. Et bien d'autres choses encore.

 L'âge n'est pas celui qui est inscrit sur notre passeport, mais c'est le temps qu'il nous reste à vivre.

 

 Il y a deux sortes de façon d'aller de Bruges à Gand : soit fuir Bruges, soit être attiré par Gand.

- Le geste n'est pas le même. partir ou arriver, ce n'est pas le même voyage. Les gens ne comprennent pas cela. Il faut savoir ce que l'on veut, et non ce que l'on fuit. La vie est une voie, un chemin, pas une destination. Et puis il y a les gens qui aiment leur enclos.

 Les départs et les arrivées ne les intéressent pas.

Ils sont bien où ils sont.

Tristan Bernand disait : "Ils se croient heureux parce qu'ils sont immobiles."

Brel ne comprend pas les inactifs. Tout doit être passion et impatience.

Il regarde mes disques. 

- J'espère que tu pas de Piaf, plaisante-t-il, car tu sais, elle, on ne doit pas l'écouter chanter, on doit la voir chanter. Ses gestes sont bien plus que des mots ; et sa voix déchirante... J'ai beaucoup appris d'elle.

Deux secondes de silence.

- Tu vois, c'est comme un Italien, on ne l'écoute pas : on le regarde parler ! "Ca marche même avec les sourds."

 

 Mes chansons sont les tableaux de mon enfance.

Brel parle souvent de la maison de sa grand-mère. Il porte en lui, et par elle, les contes flamands qui l'ont fait naviguer.

Quand il évoque la maison de sa grand-mère, et ce couloir sombre et long qui sentait bon la confiture, où il furetait, humant, touchant, pendant que les autres étaient bien endormis, il transpire d'émotion.

- J'adorais la confiture de ma grand-mère et le cramique.

 

 J'avais en ces instants l'impression de lui voler un peu de ses odeurs d'enfance, de goûter les saveurs cachées de sa "grandissance", cette jeunesse qui avance.

"Si les yeux d'un enfant servent à voir, ils servent aussi à pleurer. les maisn peuvent aussi pleurer, chanter, danser, trembler. Elles sont un prolongement de soi... repère toutes les expressions qui font allusion à la main, et tu sauras qu'elle est tout aussi importante que les yeux : "Tendre la main. Ouvrir la main. la main sur le coeur. Main dans la main. La main au cul. C'est fait main... et c'est sans fin."

 

 Dès son enafnce, Brel a tracé son chemin d'adulte.

- Un enfant se donne des valeurs ; l'adulte les perd trop souvent peu à peu, peur à peur. l'enfant est valeureux, intrépide. Il ne craint pas le froid. Ce sont les grands qui lui inventent les loups, et les sorcières !

 On a besoin de son enfance. Savoir que l'on a été petit, et fragile. C'est à ce moment-là que la vie se programme. C'est le moment où l'on pense à l'espoir d'en sortir et faire vivre ses rêves. 

 A la Franche Cordée, notre devis était : "Plus est en toi". Je ne l'ai pas oubliée.

 

 Depuis l'enfance, j'ai toujours rêvé des batailles. pas au couteau mais avec le coeur. Il nous faut tous un Far West.

L'enfance n'est-elle pas le commencement d'un voyage ? On est des chercheurs d'or. Le plus important, c'est de ne jamais en trouver. Le coeur est un eternel vagabond.

 On oublie jamais que l'on a été petit. Gran,d, on tente avec toute sa force de réaliser seulement ses rêves jolis que l'on avait enfant. L'adulte n'invente rien ; il tente de faire vivre les espoirs qu'il avait quand il était petit. Je crois qu'en réalité l'adulte crève de peur d'oser réaliser son enfance.

 Pour faire une chose, pour la faire bien : il faut d'abord y croire. C'est essentiel. Et les autres t'empêchent de croire. Comme si ta croyance tuait la leur. Pense à tous les rêves que l'on nous vole à chaque instant. C'est effrayant ! Des voleurs de rêves ! L'enfance est kidnappée.

 

 Sur ma première carte de visite, j'avais fait marquer : Jacques Berel. Fantaisiste.

Mon tour de chant est construit comme un film. Je donne tout. Qu'on ne me demande pas davantage !

 

 Le racisme c'est se tromper de colère.

"Je refus, et même j'interdis, que l'on ose juger le coeur des autres, surtout quand il s'agit de leur crédit de naissance. Si on naît, c'est pour vivre et mourir sans étiquette. On n'est pas des numéros inscrits sur une mappemonde administrée. A ton avis, toubib, suis-je Belge ou Français ? Ou simplement humain ?" 

Un Flamand ne chuchotte pas à une femme : "Je t'aime comme une fleur mais lui crie brutalement : "Je t'aime comme une montagne !". C'est à nous de gravir cette montagne, et de lui prouver ainsi qu'on l'aime, quitte à tomber du haut de nos désirs. L'amour est un ravin.

 Je sais les femmes, mais ne les connais pas. J'ai peur d'elles. Trop tentantes ? tant "offrantes". Un vertige. Elles nous éloignent de la vraie vie, car elles font vroire à l'infini."

 Puis il ajoute :

- Les femmes se prêtent ! Les mecs, nous nous donnons. C'est très dangereux de se donner ! Elles nous trichent, et nous volent. L'homme est, en général, un cocu de la vie. Nous ne faisons que les attendre. Mais qu'attendent-elles de nous ? Je ne l'ai jamais su.

"La femme est à elle-seule un tribunal. elle choisit sa victime, décide de sa peine, jamais de sa liberté. Son coeur oscille toujours de la caresse à la morsure."

  Pour lui les femmes sont fondamentalement jamouses. elles doutent d'eles comme elles doutent des hommes. "Un mec s'est différent : s'il doute de lui, il ne doute pas des autres. Sinon des femmes !"

- Devant les femmes, il nous faut une armure. Elles se prennent pour Jeanne d'Arc, et nous pour les Anglais. Elles se croient à Orléans. Elles ont la science de la ruse. Des braconnières de grands chemins.

 

 Jacques adorait le disque à la grande pochette bleue du 33 tours de Martine Baujoud. Il aime aprticulièrement son interprétation de la chanson "Hé m'man".

 J'observe à nouveau le visage de cette femme. la tête fière, la mèche luisante, elle ressemble à Napoléon au pont d'Arcole. Le regard provoquant d'avenir.


Les mots de la chanson tournent dans ma tête :

"Hé m'man, faut pas pleurer comme ça

Dis,dis-lui, hé m'man

Je me ferai raide, je serai la tour de garde...

 

Une voix de femme se révolte.

Je repose le disque. un amour est passé... 

 

Je suis maladroit, et préfère une pute qui dit en être une, et l'assume, qu'une femme qui te vouvoie et baise avec des rats. Je ne comprendrai jamais les femmes. Elles ne rêvents que d'un Tarzan et gémissent dans des bras blancs et maigres. Comment les croire ? Comment y croire ?

 Brel a souffert des femmes passagères. Seule Miche a été son arc-boutont :

- Miche, elle, m'aime pour le Jacky que je suis encore à ses yeux. Cela, elle le sait, mais sait surtout se taire. C'est mon amie et amante de ma vie.

 

 Moment où flotte l'amitié.

Je ne connais pas bien Goraguer, mais il me fait l'effet d'un homme malheureux qui fait tout pour ne pas le paraître, et qui ne fait rien pour ne pas l'être.

 

La suite prochainement.

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Published by Régis IGLESIAS - dans Les souvenirs de ...
13 novembre 2014 4 13 /11 /novembre /2014 00:00

a2cccb04"Un roman de David Foenkinos. Morceaux choisis :

 

"Voilà.

Ce que je voulais te dire.

Nous sommes un très beau début."

 

"Celui, qui, vivant, ne vient pas à bout de la vie, a besoin d'une main pour écarter un peu le désespoir que lui cause son destin."

 

"Charlotte a appris à lire son prénom sur une tombe."

 

"J’aime qu’un tableau ait l’air de s’être peint lui-même."

 

"La connivence immédiate avec quelqu'un.

La sensation étrange d'être déjà venu dans un lieu.

J'avais tout cela avec l’œuvre de Charlotte.

Je connaissais ce que je découvrais."

 

"On peut tout quitter sauf ses obsessions."

 

"C'est la seule chose que l'on peut conserver.

 Quand on n'a plus rien.

L'envie de se tenir droit."

 

"Elle n'en fait qu'à sa tête, c'est-à-dire qu'à son coeur."

 

"Je le sus dès l'instant ou je découvris Vie? ou Théâtre?

Tout ce que j'aimais.

Tout ce qui me troublait.

Warburg et la peinture.

Les écrivains allemands.

La musique et la fantaisie.

Le désespoir et la folie. 

Tout était là.

Dans un éclat de couleurs vives."

 

"Cela rejoint la définition de Kandinsky.

 Créer une œuvre, c'est créer un monde."

 

"Sans cesse,elle peint dans sa tête.

Son œuvre respire déjà en elle, malgré elle ."

 

"Elle n'a pas exécuté mais vécu l’œuvre."

 

"J'étais tous les personnages dans ma pièce.

J'ai appris à emprunter tous les chemins.

Et ainsi je suis devenue moi-même."

 

 "Il a des théories sur le rangement des livres.

Notamment celle du bon voisinage

Le livre que l'on cherche n'est pas forcément celui que l'on doit lire. 

Il faut regarder celui d'à côté."

 

"Il raconte le choc que fut pour lui la découverte de Charlotte.

C'était à Amsterdam.

Tombé sur elle par hasard, lui aussi...

Il évoque le rendez-vous important qu'il avait ce jour-là.

Et qui s'est littéralement échappé de sa mémoire.

Je suis ressorti dans le même état d'esprit.

Plus rien n'avait d'importance.

C'est tellement rare cette sensation d'être envahi totalement.

J'étais un pays occupé."

 

"Pendant le voyage, Charlotte pose des questions sur sa mère.

Le souvenir de sa présence s'est dilué dans les années.

Il est réduit à de vagues sensations, des émotions imprécises.

Elle souffre d'avoir oublié sa voix, son odeur.

La grand-mère élude le sujet, trop douloureux.

Charlotte comprend qu'il vaut mieux ne rien demander."

En janvier 1933, la haine accède au pouvoir.

Un mot de Billy Wilder : "Les pessimistes ont fini à Hollywood, et les optimistes à Auschwitz."

Il faut ranger nos livres et nos souvenirs en nous.

Elle est contrainte à l'élection de ses souvenirs.

Sa précision est la mémoire du coeur.

Elle dérive et les souvenirs revivent.

La véritable mesure de la vie est le souvenir.

Elle va peindre ses souvenirs de manière romanesque.

Tissem.

 

"Puisses-tu ne jamais oublier que je crois en toi."

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12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 22:58

upl1v71w"Les années.

 

 Sur cette photo en noir et blanc, au premier rang, à plat ventre, trois filles et un garçon, seul le haut du corps est visible, le reste plongeant dans une pente. Au dos de la photo : Cité universitaire. Mont-Saint-Agnan. Juin 1963.

 Elle est la fille du milieu. La photo a été prise dans la période séparant le passage des examens et des résultats. C'est un temps de nuits blanches, de discussions dans les bars et les chambres en ville, suivies de caresses déshabillées jusqu'au seuil d'imprudence sur fond de Javanaise.

 Elle est perdue. Elle ne pense pas non plus avoir rien de commun avec le monde ouvrier de son enfance, le petit commerce de ses parents. Elle est passée de l'autre côté mais ne saurait dire de quoi, derrière elle sa vie est constituée d'images sans lien.

 Elle ne se sent nulle part.

Aucune envie de se marier ni d'avoir des enfants. Elle est sûre que, de toute façon, elle serait une mauvaise mère. Son idéal est l'union libre d'un poème d'André Breton.

Elle voit l''avenir comme un grand escalier rouge, celui d'un tableau de Soutine reproduit dans le journal Lectures pour tous.

 Il lui arrive de s'attarder sur des images de son enfance, le premier jour d'école, une fête foraine dans les décombres, les vacances à Sotte-ville-sur-Mer...

 Elle s'imagine aussi dans vingt ans, en train de se rappeler leurs discussions de maintenant, à tous, sur le communisme, le suicide et la contraception.

 

 Elle a commencé un roman où les images du passé, du présent, les rêves nocturnes et l'imaginaire de l'avenir alternent à l'intérieur d'un "je" qui est le double décollé d'elle-même.

 Elle est sûe de n'avoir aucune "personnalité". 

 

 A côté ? Le froid et le temps gris d'un mois de mars - grève des mineurs -, la mort de Jean XXIII, la phrase d'un copain, "c'est la guerre mondiale dans deux jours", la crise de Cuba, la coïncidence entre une nuit passée à un bal de l'Unef et le putsch des généraux, Salan, Challe...

 Dans quelques mois, l'assassinat de Kennedy à Dallas la laissera plus indifférente que la mort de Marylin Monroe l'été d'avant, parce que ses règles ne seront pas venues depuis huit semaines.

 

 On découvrait le cru et le flambé, le steak tartare, au poivre, les épices et le ketchup, le poisson pané et la purée en flocons, les petits pois surgelés, les coeurs de palmier, l'aftershave, l'Obao dans la baignoire et le Canigou pour les chiens. Les coop et Familistère faisaient place aux supermarchés.

 Tous les soirs les Galeries Barbès accueillaient les acheteurs avec un buffet campagnard gratuit.

 Les jeunes couples achetaient la distinction avec une cafetière Hellem, l'eau Sauvage de Dior, une radio à modulation de fréquences, une chaîne hi-fi, des voilages vénitiens et de la toile de jute sur les murs, un salon en teck, un matelas Dunlopillo, un secrétaire ou un scriban.

 Ils fréquentaient les antiquaires, invitaient avec du saumon fumé, des avocats aux crevettes, une fondue bourguignonne, lisaient Playboy et Lui, Barbarella, Le Nouvel Observateur, Teilhard de Chardin, la revue Planète, rêvaient sur les petites annonces d'appartements "de grand standing" dans des "résidences" - le nom seul était déjà de luxe -, prenaient l'avion, s'énervaient de ne pas avoir le téléphone qu'ils réclamaient depuis un an.

  Les autres ne voyaient pas l'utilité de l'avoir et continuaient d'aller à la Poste, où le guichet composait leur numéro et les envoyait dans la cabine.

 La Religieuse de Rivette était interdite, les livres érotiques s'achetaient apr correspondance au terrain Vague.

 Plus tard, nous souvenant de la bonne voix grondeuse de Nounours dans Bonne nuit les petits on aura l'impression que c'était de Gaulle qui venait nous broder tous les soirs. 

 

 Les jeunesses du monde donnaient de leurs nouvelles avec violence.

Elles trouvaient dans la guerre du Vietnam des raisons de se révolter et dans les Cent fleurs de mao celles de rêver.

 Ils y avaient un éveil de joie pure qu'esprimaient les Beatles. Rien qu'à les entendre, on avait envie d'être heureux.

 Avec Antoine, Nino Ferrer et Dutronc, la loufoquerie gagnait.

Les adultes faisaient mine de ne rien voir, écoutaient le Tirlipot sur RTL, Maurice Biraud sur Europe, la minute du bon sens de Saint Granier, comparaient la beauté des speakerines de la télé, se demandaient qui, de Mireille Mathieu ou Georgette Lemaire, serait la nouvelle Piaf.

 On se mettait à fréquenter les rayons alimentaires de Prisu, Casino et les Nouvelles Galeries.

Au cinéma, dans la salle obscure en regardant Le Bonheur d'Agnès Varda, on ne cessait de penser, tout petit, seul dans son berceau, et vers lequel on se précipiterait en rentrant, soulagés de le voir respirer et dormir tranquillement, ses petits poings fermés.

 On achetait donc la télévision.

Le dimanche après-midi, on regardait Les Chevaliers du ciel, Ma sorcière bien aimée.

Les horaires de travail, la crèche, l'heure du bain et du Manège enchanté, les courses du samedi.

On découvrait le bonheur d'ordre et les charmes de la vie familiale en considérant les célibataires comme une espèce immature qui ignorait les traites, les eptits pots Blédina et le Dr Spock, dont la liberté d'aller et venir offensait vaguement.

 Celles qui pensaient ne jamais ressembler à leurs mères prenaient la relève, avec plus de légèreté, une forme de désinvolture que la lecture du Deuxième sexe et Moulinex libère la femme encourageaient toute valeur à ce qu'elles se sentaent tenues de faire sans savoir pourquoi.

 On parlait de la façon de manger la fondue bourguignonne - dont on avait trouvé la recette dans Elle -, les conversations petites-bourgeoises s'engageaient sur le travail, les vacances et les voitures, San Antonio, les cheveux longs d'Antoine, la laideur d'Alice Sapritch, les chansons de Dutronc. Les conversations à table ? La femme devait-elle travailler ou rester à la maison ? 

 Etait-il pensable qu'on entende toujours Dix milles Anglais sont tombé dans la Tamise pour ne pas avoir joué atout.

On était heureux d'avoir ce qu'on avait désiré, un homme, un enfant, un appartement.

 

La suite prochainement.

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12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 17:53

05nnss8k"Les années.

 

 Sur la photo de groupe en noir et blanc, vingt-six filles s'étagent sur trois rangs, dans une cour, sous les feuiles d'un marronnier. Au dessous de la photo, noté à la main Lycée Jeanne d'Arc - Rouen - Classe de philosophie 1958-1959.

 C'est elle au deuxième rang, la troisième à partir de la gauche. Difficile re reconnaître l'adolescente à la pose provocante de la photo précédente. Aucun signe sur sa figure de l'envahissement de tout son être par le garçon qui l'a déflorée à moitié cet été, comme l'ateste le vrai daim.

Elle se sent très seule.

 Elle lit Poussière de Rosamond Lehmann et tout ce qu'elle peut dans la collection des Poètes d'aujourd'hui, Supervielle, Milosz, Apollinaire, Sais-je mon amour si tu m'aimes encore.

 

 La honte ne cessait de menacer les filles. Leur façon de s'habiller et de se maquiller, toujours guettée par le trop : court, long, décolleté, étroit, voyant, etc., la hauteur de leurs talons, leurs fréquentations, leurs sorties et leurs rentrées à la maison, le fond de leur culotte chaque mois, tout d'elles étaient l'objet d'une surveillance généralisée de la société.

 Rien, ni l'intelligence, ni les études, ni la beauté, ne comptait autant que la réputation sexuelle d'une fille, c'est-à-dire sa valeur sur le marché du mariage, dont les mères, à l'instar de leurs mères à elles, se faisaient les gardiennes : si tu couches avant d'être mariée, personne ne voudra plus de toi.

 Les filles étaient hantées par "l'accident".

 Elles ne se doutaient pas que les garçons étaient aussi effrayé de leurs corps.  Que s'ils répondaient par monosyllabes à leurs questions les plus innocentes, ce n'était pas mépris mais crainte des complications de leur ventre-piège, tout compte fait ils préféraient se branler le soir.

 

 Cependant, on flirtait de plus en plus loin, la fellation, le cunnilingus et parfois la sodomie.

Les garçons se moquaient de la capote anglaise et refusaient le coïtus interruptus de leurs pères. On rêvait aux pilules contraceptives qui, on disait, se vendaient en Allemagne.

 Le samedi, à la file, se mariaient des filles en voile blanc qui accouchaient six mois après de prétendus et robustes prématurés.

 Prises entre la liberté de Bardot, la raillerie des garçons qu'être vierge c'est malsain, les prescriptions des parents et de l'Eglise, on ne choisissait pas.

 

 Quelle mémoire prêter à cette fille du deuxième rang ? Peut-être n'en a-t-elle plus d'autre que celle de l'été d'avant, mémoire presque sans images, incorporation en elle d'un corps manquant, un corps d'homme. Et deux visées pour l'avenir : 1) devenir mince et blonde, 2) être libre, autonome et utile au monde.

 Se rêvant en Mylène Demongeot et Simone de Beauvoir.

 

 L'époque était aux grandes paroles et aux grands deuils, Gérard Philippe et Camus, il y aurait le paquebot France, la caravelle et le Concorde, l'école jusqu'à seize ans, les maisons de la culture et un jour où l'autre, la paix en Algérie.

 Il y avait le nouveau franc, le scoubidou, les yaourts aromatisés, le lait en berlingot et le transistor.

 Pour la première fois, on pouvait entendre de la musique n'importe où, sur le sable de la plage à côté de sa tête, dans la rue en marchant.

Et les jeunes arrivaient, de plus en plus nombreux. On leur faisait lire Rémi et Colette.

On nous fournissait de quoi nous amuser, le hula hoop, Salut les copains, Age tendre et tête de bois, on n'avait le droit de rien, ni voter ni faire l'amour ni donner son avis.

 Pour avoir droit à la parole, il fallait "entrer" dans l'enseignement, à la Poste ou à la SNCF, chez Michelin, Gilette, dans les assurances : "gagner sa vie".

 L'avenir n'était qu'une somme d'expériences à reconduire, service militaire de vingt-quatre mois, travail, mariage, enfants. Mais le discours et les institutions était en retard sur nos désirs. En notre for intérieur, on était A bout de souffle.

 

 Les gens en avaient plus qu'assez de l'Algérie, des bombes de l'OAS déposées sur le rebord des fenêtres à Paris, de l'attentat du Petit-Clamart - de se réveiller avec l'annonce d'un putsch de généraux inconnus qui troublaient la amarche vers la paix. Sans oublier Ben Bella et Ferhat Abbas.

 Personne ne s'est demandé si les accords d'Evian étaient une victoire ou une défaite, c'était le soulagement et le commencement de l'oubli et on espérait partir l'été prochain en espagne, tellement bon marché selon les dires de ceux qui y étaient allés.

 

 Les gens étaient habitués à al violence et à la séparation du monde : Est/Ouest, Khrouchtchev le moujik / Kennedy le jeune premier, Peppone / Don Camillo, JEC/UEC, L'huma/L'Aurore, Franco/Tito, cathos/coco.

 Les adultes ne se plaigaient pas. Ils écoutaient Jean Nocher faire la morale à la radio tous les soirs.

 

 Nous, on préparait nos certificats de licence en écoutant le transistor. On allait voir Cléo de cinq à sept, L'année dernière à Marienbad, Bergman, Bunuel et le cinéma italien.

 On aimait Léo Ferré, Barbara, Jean Ferrat, Leny Escudero et Claude Nougaro. On lisait Hara-Kiri.

 On ne se sentait rien en commun avec les yéyés qui disaient Hitler connais pas et leurs idoles plus jeunes que nous, filles à couettes et à chansons pour cour de récréation, garçon rugissant se roulant par terre sur la scène. Auprès d'eux, nous étions vieux. Peut-être que nous aussi on mourrait sous de Gaulle.

 

 On n'osait pas citer Freud, à peine on se hasardait Bachelard et le temps humain de Georges Poulet. L'Education sntimentale était le "premier roman moderne".

 Entre amis, on s'offrait des livres sur lesquels on écrivait une dédicace.

C'était le temps de kafka, Dostoïevski, Virginia Woolf, Lawrence Durrell.

On découvrait le "nouveau roman", Butor, Robbe-Grillet, Sollers, Sarraute.

 

 Dans les déjeuners du dimanche, la tablée discutait de l'apparition d'un supermarché, et de la construction d'une piscine municipale, des 4 L et des Ami 6.

 Ceux qui avaient acheté une télévision discutaient du physique des ministres et des speakerines, parlaient des vedettes qu'ils voyaient à l'écran comme s'ils agissaient de voisins de palier.

 "36 Chandelles, Zitrone, Anne-Marie Peysson, les bébés passés à la moulinette d'Averty...

 

 Quand un oncle essayait de raviver un souvenir "te souviens-tu quand je t'ai appris à monter à bicyclette ?", on le trouvait vieux.

 On revenait à table pour le dessert, essouflés d'avoir trop joué, avant d'écouter des refrains que personne ne se souciait plus de reprendre aujourd'hui.

 

 La suite prochainement.

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12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 15:12

4bs080vk"Les années.

 

 Sur cette photo, une granbde fille aux cheveux foncés se tient de biais, légèrement déhanchée de manière à faire saillir la courbe de ses cuisses, serrées dans une jupe droite. La lumière effleure la pommette droite, souloigne la oitrine pointant sous un pull d'où dépasse un col Claudine Blanc.

 Au dos de la photo, 1957, Yvetot.

 

 Sans doute elle ne pense qu'à elle, en ce moment précis où elle sourit en écoutant dans l'îlot de sa chambre Sydney Bechet, Edith Piaf et le 33 tours de jazz offert par le Guilde internationale du disque.

 Elle notait alors dans un calepin des phrases qui disent comment vivre, il n'y a de bonheur réel que celui dont on se rend compte quand on jouit.

 

 Elle n'a ni Frigidaire, ni salle de bains, les vécés sont dans la cour et elle n'est toujours pas allée à Paris. Elle est "marrante" e "relaxe", dit "ma piaule" et "j'ai les pétoches".

 Elle espère "avoir un genre" et s'imagine ressemblant à Marine Vlady dans La Sorcière. Elle rêve d'indépendance, d'une 2 CV ou 4 CV. 

 Sur cette image s'étend l'ombre de l'homme, l'inconnu, qu'elle rencontrera comme dans Un jour tu verras, la chanson de Mouloudji ou s'élançant l'un vers l'autre comme Michelle Morgan et Gérard Philippe à la fin des Orgueilleux.

 Elle est sûre qu'elle doit se "garder pour lui" et ressent comme une faute contre le grand amour de connaître déjà le plaisir toute seule. Bien qu'elle ait inscrit dans un carnet les jours où l'on ne risque pas d'être enceinte d'après la méthode Ogino, elle n'est que sentiment. Entre le sexe et l'amour, le divorce est total.

 Au milieu des albums de Bécassine, la retraite de la communion et des jeux de balle au mur.

 Des années récentes, elle n'a pas non plus envie de se souvenir, tout n'est que gaucherie et honte, les déguisements en danseuse de music-hall, la permanente risée, les socquettes.

 Elle ne peut savoir que de cette année 57 elle retiendra :

Le bar du casino de la plage où elle a tété fascinée par un couple qui dansait seul sur la piste, un blues, lent et serré. La femme, longue et blonde, portait une robe blanche en plissé "soleil". Ses parents, qu'elle avait entraînés là contre son gré, se demandaient s'ils avaient assez d'argent pour payer les consommations.

Les cabinets glacés, dans la cour de récréation, où elle a dû descendre un jour de février en plein cours de math à cause d'une crise d'entérite et elle pense à Roquentin dans le jardin public, se dit Le ciel est vide et Dieu ne répond pas.

 La fête foraine quand provient de derrière les arbres la grande voix des hauts-parleurs, les musiques et les annonces fondues en une rumeur incompréhensible. Comme si elle était hors de la fête, hors du temps.


 L'Europe est alors coupée en deux par une muraille de fer, à l'ouest du soleil et des couleurs, à l'ombre le froid, la neige et les chars qu s'installeront un jour à Paris, comme à Budapest, les noms d'Imre nagy et de Kadar l'obsèdent.

 Les gens faisaient fon de plus belle, sur une existence meilleure grâce aux choses. Ils changeaient la cuisinière, la table en bois couverte d'une toile cirée pour une en Formica, la 4 CV pour une Dauphine, remplaçaient le rasoir mécanique et le fer à repasser en fonte pour leurs équivalents électriques, les ustensiles en métal par les mêmes en plastiques.


 D'aucun ne craignaient pas de partir en vacances à l'étranger sans connaître la langue, comme en témoignait le F collé sur les plaques d'immatriculations.

 Les plages étaient bondées le dimanche de corps en bikibi, offerts au soleil dans l'indifférence du monde. Rester assis sur les galets ou se baigner seulement les pieds la jupe relevée se faisait de moins en moins.

 Le petit dernier ne se baigne pas ? "Il a des complexes". On annonçait "la société des loisirs".

 

 Mais ils s'énervaient de la politique, des présidents de conseil valsant tous les deux mois, et des jeunes envoyés inlassablement se faire tuer dans des embuscades. Ils votaient Poujade. Ils répétaient "où on va".

 Le coup d'Etat du 13 mai à Alger les jetait dans la débâcle, ils stockaient des kilos de sucre et des litres d'huile en prévision de la guerre civile.

 Ils ne croyaient que dans le général de Gaulle pour sauver tout, l'Algérie et la France.

Ils étaient soulagés que le sauveur revienne aux affaires.

 

 Nous qui avons le souvenir d'un visage sec sous un képi, petite moustache d'avant-guerre, qui n'avions pas entendu l'appel du 18 juin, étions ahuris et déçus par ces joues pendantes et ces sourcils broussailleux de notaire engraissé, cette voix parasitée par un tremblement de vieux.

 "Avoir ses deux bacs" - le premier en fin de première, le second l'année d'après - était la certitude d'une future réussite sociale. Les parents trouvaient seulement "beau d'aller jusque-là".

 

 Sur la musique du Pont de la rivière Kwaï, on se sentait parti pour le plus bel été de la vie. Les parents s'arrangeaient pour faire le tour de la famille et des amis, annoncer la nouvelle glorieuse. Il s'en trouvait toujours pour plaisenter, "moi aussi j'ai passé le bac, sur la seine à Caudebec !".

 La vraie récompense du bac aurait été de vivre une histoire d'amour ressemblant à Marianne de ma jeunesse.

En attendant, on flirtait, retrouvant en cachette celui qui descendait un peu plus bas à chaque rendez-vous et qu'il faudrait quitter bientôt parce qu'on n'allait pas faire l'amour pour la première fois avec un garçon que les copines trouvaient rougeaud.

 

 L'espace s'élargissait enfin, cet été-là ou un autre. Les plus riches partaient en Angleterre. Les autres, moniteurs dans une colonie de vacances, pouvaient changer d'air, découvrir la France et se payer les livres de la rentrée suivante en chantant Pirouette cacahouète.

 Loin du regard des aprents, en blue-jean et une Gauloise à la main, on sautait les marche deux par deux vers la cave d'où s'échappait la musique de la surboum, comme si on allait mourir à la fin des vacances à la manière du film Elle n'a dansé qu'un seul été.

 C'est à cause de cette sensation éperdue qu'on se retrouvait après un slow sur un lit de camp ou sur la plage avec un sexe d'homme - jamais vu sauf en photo et encore - et du sperme dans la bouche pour avoir refusé d'ouvrir les cuisses, se souvenant in extremis du calendrier Ogino.

 Un jour blanc se levait sans signification.

Sur les mots qu'on aurait voulu oublier aussitôt après les avoir entendus, prends ma queue suce-moi, il fallait mettre ceux d'une chanson d'amour, c'était hier ce matin-là, c'était hier et c'est loin déjà, embellir, construire la fiction de la première fois" sur le mode sentimental, envelopper de mélancolie le souvenir d'un dépucelage raté.

 Si on n'y arrivait aps, on s'achetait des éclairs et des bonbons, on noyait le chagrin dans la crème et le sucre ou bien l'on se purgeait par l'anorexie.

 Mais une chose est sûre, il ne serait plus jamais possible de se rappeler comment était le monde avant d'avoir eu un corps nu contre le sien.

 

La suite prochainement.

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11 novembre 2014 2 11 /11 /novembre /2014 22:19

pdwrp678"Les années.

 

 Sur une photo en noir et blanc, deux filles dans une alllée. En fond des arbustes et un haut mur de brique, au dessus le ciel avec des grands nuages blancs. Au dos de la photo : juillet 1955.

 La mode "ce qui se fait" est alors dans les magasins des grandes villes la grande jupe écossaise à mi-mollet, pull noir et gros médaillon, queue-de-cheval avec frange à la façon d'Audrey Hepburn dans Vacances Romaines.

 Aux yeux de tous ceux qui sont nés après, elle est simplement ancienne. Pourtant, cette lumière qui éclaire la visage de cette fille et son pull entre les seins qui pointent a été sensation de chaleur d'un soleil de juin d'une année qui ne peut se confondre avec aucune autre, 1955.

 Elle, elle n'est jamais encore allée à Paris, elle n'a pas de tourne-disques. En faisant ses devoirs, elle écoute les chansons du poste dont elle décrit les paroles dans un carnet et qu'elle porte dans la tête des journées entières en marchant, en suivant les cours, toi qui disais que tu l'aimais qu'à-tu fait de ton amour pour qu'il pleure sous la pluie.

 

 Elle ne parle pas aux garçons, elle y pense tout le temps. Elle voudrait avoir le droit de mettre du rouge à lèvres, porter des bas et des talons hauts - les socquettes lui font honte - afin de montrer qu'elle appartient à la catégories des jeunes filles et qu'elle peut être suivie dans la rue.

 Elle doit rentrer le soir à l'heure ("quand je dis telle heure, c'est telle heure, pas une minute de plus").

 Elle compense l'interdiction générale sortir par la lecture des feuilletons dans les journaux, Les gens de Mogador, Afin que nul ne meure, Ma cousine Rachel, La Citadelle.

 Constamment elle s'irréalise dans des histoires et des rencontres imaginaires qui finissent en orgasmes le soir sous les draps. Elle se rêve en putain et elle admire aussi la blonde de la photo, d'autres filles de la classe au-dessus, qui la renvoient à son corps empoissé. Elle voudrait être elles.

 Au cinéma, elle a vu La Strada, Le défroqué, Les Orgueilleux, La Mousson, La Belle de Cadix mais pas les films  qui lui sont interdits : Les enfants de l'amour, Le blé en herbe, Les compagnes de la nuit...

 Monter en ville, rêver,  se faire jouir et attendre, résumé possible d'une adolescence en province.

 

 Quelles traces des évènements et faits divers qui font dire plus tard "je me souviens" quand une phrase entendue par hasard les évoque ?

La grande grève des trains de l'été 53

La chute de Dien Biên Phu

La mort de Staline annoncée à la radio un matin froid de février, justa avant de partir pour l'école

Les élèves des petites classes en rang vers la cantine pour boire le verre de lait de  Mendès France

La couverture faite de morceaux tricotés par les élèves et envoyée à l'abbé Pierre, dont la barbe est prétexte à des histoires cochonnes

La vaccination monstre, de toute la ville, à la mairie, contre la variole, parce que plusieurs personnes en sont mortes à Vannes

Les innondations en Hollande

Les évènements d'Algérie

 

 Les grandes vacances seront une longue étendue d'ennui, d'activités minuscules pour remplir les journées :

Ecouter l'arrivée de l'étape du Tour de France, coller la photo du vainqueur dans un cahier spécial

Relever les numéros de département sur les plaques minéralogiques des voitures croisées dans la rue

Lire dans le journal régional les résumés des films qu'elle ne verra pas, des livres qu'elle ne lira pas

Broder un porte-serviette

Extraire des points noirs et se passer de l'Eau Précieuse ou des rondelles de citron

Monter en ville acheter du shampoing et Petit Classique Larousse, en passant les yeux baissés devant le café où les garçons jouent au flipper

 

 Quand elle entend les petites filles des classes enfantine chanter dans la cour de récréation Cueillons la rose sans la laisser flêtrir, il lui semble qu'elle a été enfant il y a très longtemps.

 Aux repas de famille, on se pénétrait de la douceur de la table festive où la dureté h bituelle du jugement social s'atténue, et les fâchés à mort de l'année dernière réconciliés se passent le bol de mayonnaise. On s'ennuyait un peu mais pas au point de préférer être au lendemain en cours de math.

 Après les commentaires sur les plats en train d'être dégustés, qui appelaient les souvenirs des mêmes mangés en d'autres circonstances, les conseils sur la meilleure façon de les préparer, les convives discutaient du Spoutnik et de qui, des Américains ou des Russes, irait les premiers sur la lune, des cités d'urgence de l'abbé Pierre, de la vie chère.

 La guerre finissait par revenir sur le tapis.

Ils rappelaient l'Exode, les bombardements, les restrictions de l'après-guerre, les zazous, les pantalons de golf.


 C'était le roman de notre petite enfance, qu'on écoutait dans une nostalgie indéfinnissable, la même qu'on ressentait en récitant avec ferveur Souviens-toi, Barbara, recopié dans un cahier personnel de poèmes.

Il n'était déjà plus question de l'Indochine, si lointaine, si exotique - "deux sacs de riz suspendus de part et d'autre d'une tige de bambou", selon le manuel de géographie - et perdue sans excès de regret à Diên Biên Phu.

 Ils n'avaient pas non plus envie de s'assombrir l'atmosphère avec les troubles en Algérie. mais ils étaient tous d'accord, l'Algérie avec ses trois départements était la France et il fallait bien que la rebellion soit matée, nettoyés les "nids de fellaguas".

 A la dérision dont les Arabes et leurs mots étaient rituellement l'objet, habana la moukère mets ton nez dans la cafetière tu verras si c'est chaud.

 Normal donc que les soldats du contingent soient envoyés pour rétablir l'ordre, même si de l'avis général c'était malheureux pour les parents de perdre un garçon de vingt ans, qui devait se marier, dont la photo figurait dans le journal régional sous la mention "tombé dans une embuscade".

 C'était des tragédies individuelles, des morts au coup par coup. Il n'y avait ni ennemi, ni combattant, ni bataille. On n'avait pas un sentiment de guerre.

 La prochaine viendrait de l'Est, avec les chars russes comme à Budapest pour détruire le monde libre et il était inutile de partir sur les routes comme en 40, la bombe atomique ne laisserait aucune chance. Déjà, on avait eu chaud avec le canal de Suez.

 Personne ne parlait des camps de concentration.

C'était devenu un malheur privé.


 Au dessert, les chansons patriotiques d'après la libération avaient disparus. Les parents entonnaient Parlez-moi d'amour, de vieux jeunes gens Mexico et les enfants Ma grand-mère était cow-boy.

 Nous on aurait eu trop honte de chanter comme avant Etoile des neiges.

 Priés d'en pousser une, on prétendait ne connaître aucune chanson en entier, certains que Brassens et Brel détonneraient dans la béatitude des fins de repas.

 On ne aprlait pas de nos goûts musicaux qu'ils ne pouvaient comprendre et ils ignoraient l'existence des Platters et de Bill Haley.

 Puis le lendemain de ce jour de fête, c'était le retour de la sonnerie régulière des heures de cours, le retour des compositions trimestrielles, les explications interminables de Cinna et d'Iphigénie, la traduction du Pro Milone. On notait des phrases d'écrivain sur la vie, exister c'est se boire sans soif.

 On collait sur les feuilles d'un classeur les photos de Brigitte Bardot dans Et Dieu créa la femme, gravait dans le bois du pupitre les initiales de James Dean.

 On recopiait des poèmes de Prévert, les chansons de Brassens, Je suis un voyou et La première fille, interdites à la radio.

 On lisait en cachette Bonjour tristesse et les Trois essais sur la théorie de la sexualité. Le champ des désirs et des interdictions devenait immense. Les adultes nous reprochaient de ne rien respecter.

 Une phrase à table : "Si tu avais eu faim pendant la guerre tu serais moins difficile".


 Le désir immédiat de posséder un électrophone et quelques microsillons, des objets dont on pouvait jouir sans fin, jusqu'à l'écoeurement. La lycéenne aisée portait des duffle-coats, appelait ses parents "mes vieux" et disait ciao pour au revoir.

 On était avide de jazz et de nego spirituals, de rock'n roll. Tout ce qui se chantait en anglais était nimbé d'une mystérieuse beauté.

 Dans le secretd e la chambre, on se faisait une orgie du même disque, c'était comme une drogue qui emportait la tête, éclatait le corps, ouvrait devant soi un autre monde de violence et d'amour - se confondant avec la surboom où il tardait tant d'avoir le droit d'aller.

 Elvis Presley, Bill Haley, Armstrong, les Platters incarnaient la modernité, l'avenir, et c'était pour nous les jeunes, et nous seuls qu'ils chantaient, laissant derrière les vieux goûts des parents et l'ignorance des péquenots, Le Pays du sourire, André Claveau et Line Renaud.

 On se sentait appartenir à un cercle d'initiés. Cependant Les amants d'un jour donnaient la chair de poule.

 

 A force de tourner et de se croiser en bandes séparées, le dimanche après la messe ou le cinéma, d'échanger des regards, filles et garçons s'abordaient.

 Eux imitaient leurs profs, faisaient des jeux de mots et des contrepèteries, se traitaient de "puceau", se coupaient la parole, "raconte pas ta vie, elle est pleine de trous", "tu connais le refrain du presse-purée ? Ecrase et continue", "T'as le gaz chez toi, va te faire cuire un oeuf". Ils s'amusaient à aprler bas pour que l'on ne comprenne pas et s'écriaient "la masturnation rend sourd". Devant une gencive enflée, ils en rajoutaient une couche "on a vu assez d'horreur pendant la guerre'.

 Ils se débondaient en histoires sales, entonnaient le de morpionibus. Les filles souriaient avec réserve.

C'est grâce à eux qu'elles enrichissaient leur stock de mots et d'expressions qui les ferait paraître évolués aux yeux des autres filles quand elles diraient aller au pieu, un falzar, etc. Mais on avait toutes la trouille avant de se rendre au premier rencard.

 

La suite prochainement.

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Livre d'or

Première affiche

 

  "MA MAMIE M'A DIT"  

Spectacle nostalgique 

 

"On nous avait promis la magie, promesse tenue : un spectacle plein de féérie de souvenirs où chacun se retrouvait. Une belle énergie. Les résidents ont adoré. Merci." Marie ("La Clairière de Luci" - Bordeaux)
 
"Formidable ! Nous sommes tous remontés dans le temps, nous avons vingt ans, on a ri, on a presque pleuré et surtout on a chanté. Merci." Cathy (Arles)
 
"Un véritable petit chef d'oeuvre" ; "La légion d'honneur pour la créativité" "Un véritable artiste" ; "Après-midi formidable" ; "Absolument parfait" ; "Une rétrospective originale" ; "Un très bon moment d'évasion". Propos recueillis à la résidence Emera d'Angoulême  
 
"Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux... C'était magnifique. Nous avons revu toute notre jeunesse et notre enfance. Et c'est beau de redevenir jeune dans l'ambiance d'autrefois." Aimée et Janine
 
"Les chansons, les réclames et les anecdotes ont transporté les résidents dans leur enfance. Une après-midi de nostalgie mais aussi de chansons et de rires. Merci encore pour ce magnifique spectacle." Sandrine
 
"Spectacle complet, tellement agréable et thérapeutique pour nos personnes âgées, encore félicitations !" Docteur Souque
 
"Un choix extraordinaire de chansons, des moments magiques, des photos magnifiques, vous nous avez mis de la joie dans le coeur. Et retrouver sa jeunesse avec tous ces souvenirs, ça fait plaisir et j'espère que vous reviendrez nous voir." Mme Lorenzi (Juan-Les-Pins)
 
"Pour ma fête, par un pur hasard je me suis retrouvé dans un club de personnes âgées où j'ai pu assister à votre spectacle sur le passé. Cela m'a rappelé mes grands-parents et mes parents et c'était vraiment un moment magique." Josette, La Roque d'Antheron
 
"Bravo bravo bravo Regis, c'est le meilleur spectacle que j'ai vu depuis que je fais le métier d'animatrice." Bénédicte La Salette-Montval (Marseille)
 
"Je n'imaginais pas lorsque je vous ai accordé un rendez-vous que vous enchanteriez pendant 1 h 1/4 les personnes âgées d'une telle façon. Merci pour votre prestation qui a fait revivre les moments publicitaires, évènementiels et musicaux de leurs vies." Michelle, CCAS de Toulouse
 
"Un super voyage dans le temps pour le plus grand plaisir des résidents. Merci à Régis pour cette magie et à bientôt." Brigitte (Lunel)
 
"Enfin un retour à notre "époque". Quel bonheur, que de souvenirs, quelle belle époque ou l'amitié était de mise. Merci pour cette très belle après-midi, on s'est régalé avec ce très très beau spectacle". Danielle (Mirandol)
 
"Super - divinement bien -  tout le monde était enchanté même que M. Benaben a dit : "Vous nous avez donné l'envie de revivre notre vie"." Sylvie (Sainte Barthe)
 
"Un grand merci pour ce bon moment et je crois, je suis sûre, qu'il a été partagé par mon mari." Mme Delbreil
 
"Une féérie de l'instant." Christian
 
"Beaucoup d'émotion dans ce spectacle plein de chaleur et d'humanité." Sylvie
 
"Une soirée inoubliable. Continuez à nous émerveiller et faites un long chemin." Claude
 
"Le meilleur spectacle que j'ai jamais vu. De loin." Tonton Kiko
 
"C'est bien simple, je n'ai plus de Rimmel !" Claudine (seconde femme de Tonton Kiko)
 
"A ma grande surprise, j'ai versé ma larme. Tu as atteint mon coeur. Bravo pour ces sentiments, ces émotions fortes, j'ai eu des frissons par moment." Ta couse Céline
 
"Redge, encore un bon moment passé en ta présence. On était venu plus pour toi que pour le spectacle, mais quelle agréable surprise ! On est fier de toi, continues d'oser, de vivre !" Pascale
 
"J'avais froid, un peu hagard, l'humeur moribonde et puis voilà, il y a toi avec toute ta générosité, l'intérêt, l'affection que tu as toujours su apporter aux autres, à moi aussi et Dieu sait si tu m'as rendu la vie belle depuis qu'on se connaît comme tu as su le faire une fois de plus." Jérôme
 
"Ce spectacle est nul à chier et je pèse mes mots." Gérard
 
memoria.viva@live.fr

Ma Mamie m'a dit...

Madka Regis 3-copie-1

 

COLLECTION "COMEDIE"

Mamie est sur Tweeter

Mamie n'a jamais été Zlatanée !

Mamie doit travailler plus pour gagner plus

Mamie, tu l'aimes ou tu la quittes

"Casse-toi pauvre Régis !"

Papi a été pris pour un Rom

Mamie est sur Facebook

Papi est sur Meetic

Il y a quelqu'un dans le ventre de Mamie

Mamie n'a pas la grippe A

La petite maison close dans la prairie

 

COLLECTION "THRILLER"

Landru a invité Mamie à la campagne...

Sacco et Vanzetti

Mamie a rendez-vous chez le docteur Petiot

La Gestapo française

Hiroshima

 

COLLECTION "SAGA"

Les Windsor

Mamie et les cigares du pharaon

Champollion, l'homme qui fit parler l'Egypte

Mamie à Tombouctou

 

COLLECTION "LES CHOSES DE MAMIE"

Mamie boit dans un verre Duralex

Le cadeau Bonux

Le bol de chocolat chaud

Super Cocotte

Mamie ne mange que des cachous Lajaunie

 

COLLECTION "COUP DE COEUR"

Mamie la gauloise

Mamie roule en DS

Mamie ne rate jamais un apéro

Mamie et le trésor de Rackham le Rouge

 

COLLECTION "DECOUVERTE"

Mamie va au bal

La fête de la Rosière

Mamie au music-hall

Mamie au Salon de l'auto

 

COLLECTION "SUR LA ROUTE DE MAMIE"

Quand Papi rencontre Mamie

Un Papi et une Mamie

Mamie fait de la résistance

Mamie au cimetière

24 heures dans la vie de Mamie

 

COLLECTION "MAMIE EXPLORE LE TEMPS"

Jaurès

Mamie embarque sur le Potemkine

Mamie et les poilus

Auschwitz

 

COLLECTION "FRISSONS"

Le regard de Guynemer

Mr et Mme Blériot

Lindbergh décroche la timbale

Nobile prend des risques

 

COLLECTION "MAMIE EN BALLADE"

Mamie chez les Bretons

Mamie voulait revoir sa Normandie !

La fouace Normande

La campagne, ça vous gagne...

Mamie à la salle des fêtes

Launaguet

La semaine bleue

Le monastère

 

COLLECTION "MAMIE AU TEMPS DES COURTISANES"

Lola Montès

Les lorettes

Mme M.

Napoléon III

Plonplon

La marquise de Païva

Mme de Pompadour

Générique de fin