"Clo-clo.
Claude François est un forçat de travail issu de la vague yéyé. Après des débuts difficiles, cet ex-batteur de jazz va enchaîner les tubes au début des années 1960, de Belles, belles, belles à Si j'avais un marteau, adaptation d'une chanson folk américaine qui se vend à deux millions d'exemplaires et impose son personnage énergique, sautillant et gentillet que toute la France surnomme dorénavant Clo-clo...
Dès lors, il est LE chanteur de variété française, incarnant presque à lui tout seul ce genre tant décrié par les rockers : paroles souvent niaises, musique enrobées d'arrangements sirupeux ou ronflants (violons, trompettes, tout y passe), chorégraphies aguicheuses et ringardes (avec l'apparition des Clodettes dès 1966), look minet...
Véritable bourreau de travail, redoutable businessman menant ses équipes à la baguette mais possédant surtout un grand flair musical ("J'attendrai", "C'est la même chanson") ou se les fait confectionner sur mesure comme l'immense Comme d'habitude, qui deviendra sous le titre My Way, la chanson la plus reprise dans le monde.
Le début des années 70 sera placé sous le règne absolu de Claude François. Un tube chasse l'autre : Il fait beau, il fait bon, Y a le printemps qui chante, Le lundi au soleil (écrite par Patrick Juvet, sorte de fils spirituel), Chanson populaire, Le téléphone pleure, Le mal aimé, etc.
Les disques Flèche, la maison de production qu'il a fondé, tournent à plein régime : à chaque single à succès correspond un album de 33 tours de douze titres dont onze ne laissent aucun souvenir à personne (qui a dit "remplissage" ?).
Une véritable entreprise industrielle qui s'est en plus dotée d'un moyen de promotion imparable : en 72, Claude François lance le magazine Podium, dédié à la variété française !concurrent de Salut les Copains et Hit Parade qui monopolisent alors le secteur) mais surtout, à la gloire de son propriétaire. Chaque numéro s'orne de nombreuses photos de chanteurs populaires parmi lesquels on retrouve chaque mois un certain Claude François !
S'il a pu craindre une légère baisse de régime en 1975, le patron est rassuré par son grand coup en 77 : la découverte du disco et son adaptation à sa sauce. Avec Magnolias For Ever et Alexandrie Alexandra, Clo-clo prend le bon tournant (c'était ça ou le punk...) et habille sa musique de paillettes et de batteries puissantes. Malheureusement, le chanteur businessman survolté ne profitera pas longtemps de ce nouveau succès.
Ma Mamie m'a dit qu'elle a appris sa mort chez son oncle et qu'elle avait été ravagée par la nouvelle.
Complètement ravagée.