"Rendez-vous.
Un rendez-vous en début de matinée. A la fraîche. Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt après tout.
Et puis l'avantage de se retrouver à 8 h 30, chez elle, c'est que ça laisse du temps pour faire connaissance et pour connaître son monde. Sa décoration intérieure, l'agencement de sa cuisine, sa chambre. Sur le papier en tout cas, ça tenait le route.
Première erreur.
Tu arrives, tu allumes la télé, pour l'ambiance et tu tombes sur Télématin. Oui, ça calme. William Leymergie, il est bien gentil mais pour se mettre dans un état d'excitation, il y a mieux.
Bizarrement, c'est la même question qui tombe : "Qu'est ce que tu bois ?" En général, lors d'un rendez-vous galant, la réponse est a choix multiple : bière, whisky, vodka, rhum et j'en passe. La liste est non exhaustive.
Là, non.
J'ai eu un choix d'une simplicité effrayante : "Thé ou café ?" J'ai choisi le café.
Deuxième erreur.
On ne se pose pas la question de l'haleine en fin de soirée après trois bouteilles de whisky et 40 Marlboro. Pourtant aussi surprenant que cela puisse paraître, on se la pose après un café au réveil.
Sans parler des techniques de séduction qui n'ont absolument rien à voir. Il semblerait dorénavant acquis qu'on ne propose pas un pas de danse à une heure si matinale. Ce serait déplacé. De manière générale, on ne séduit pas de la même façon à 10 heures du soir qu'à 8 heures du mat. Je l'ai appris à mes dépens.
Ce fut ma troisième erreur.
Du coup, je me suis surpris à poser des questions étonnamment idiotes. Le manque de fluidité dans mes gestes était évident. Le fait de bâiller était aussi un handicap palpable. Signe d'ennui vraisemblablement, ce qui n'était pas du tout le cas. En tout cas, pas pour moi.
Autre point marquant : les codes changent. Au cours d'un rendez-vous, à une heure raisonnable, il y a toujours un copain ou une copine mis au parfum, qui vous appelle pour vous sortir de ce guêpier. Au cas où... Mais qui vous appelle à 8h du mat ? Personne.
En tout cas personne ne m'a appelé ce matin-là. Pour mon plus grand malheur. Et le sien.
Malgré tout, en début d'après-midi, on a trouvé notre rythme de croisière. Elle m'a raconté sa vie. Ses rêves d'enfant. Elle jouait à la marelle en cours de recrée quand elle était gamine. Un mariage trop tôt. Un divorce trop tard. Des enfants merveilleux.
Desperate Housewives est sa série culte parce qu'elle trouve qu'elle "ressemble beaucoup à Susan Mayer dans la vie même si sexuellement parlant, ce serait plutôt Gabrielle Solis". Étonnamment, cette dernière remarque a tout fait basculer et on s'est retrouvé au lit, d'un coup d'un seul.
Une tornade.
Au bout de deux heures, j'ai levé la tête pour tomber nez à nez avec sa photo de mariage posée sur la commode où on la reconnaissait très bien à côté de Tescano. J'ai su tout de suite que c'était ma quatrième et dernière erreur.
Une erreur fatale.