"La fête de la Rosière.
Le soir dans les campagnes, garçons et filles parcourent très souvent plusieurs kilomètres pour se retrouver aux veillées qui se poursuivent au hasard des bottes de foin ou de paille, dans les granges et les étables.
Garçons et filles se retrouvent chaque jour dans la campagne, le dimanche à la sortie de la messe ou des vêpres, au bal ou le soir à la veillée. Un vieux dicton dit : "jeunes galants dans les veillées sont comme le renard avec les poules"...
Les jours de marché ou de foire aux bestiaux donnent l’occasion de rencontre et d’amusement. Bien des accordailles et des relations en vue du mariage s’y nouent. Dans la Loire, les jeunes filles à marier s’y rendent par groupe de deux ou trois, habillées de couleurs vives. Elles y dévisagent les jeunes gens, leur font des avances en les taquinant. La foire de Niort est la plus renommée : dès l’âge de quinze ans, les jeunes filles "à marier" accompagnent leurs mères pour y être présentées sur le marché du mariage. On ne dit pas qu’une fille à dix-sept ans, on dit qu’elle a "quinze ans et deux foires !"
Le lundi de pâques à Challans, en Vendée, se tient une véritable foire aux célibataires assez surprenante... Le long du trottoir de la rue principale, dos au mur des maisons, les filles en âge de se marier s’offrent à la vue des jeunes gens, qui par trois ou quatre, les observent et choisissent comme ils le feraient pour un boeuf ou un cheval ! Vers 16 heures, tout est fini...
En 1906, on raconte que plus de 1500 jeunes y sont venus par trains complets pour "maraîchiner" ensemble. Lorsqu’on s’est plu, on mange, on boit, on danse, on échange des baisers passionnés jusque tard dans la nuit, puis le jeune homme accompagne la demoiselle chez ses parents. Une pratique qui permet à la jeune fille "l’essai de plusieurs galants". Les "laissées-pour compte" viendront peut-être retenter leur chance le dimanche suivant...
Dans les Landes, les jeunes gens qui se plaisent se serrent la main en signe d’accord, puis se promènent enlacés, main gauche dans main gauche, main droite dans main droite, passés dans le dos. Des pratiques qui éveillent néanmoins quelques réticences dans l’opinion villageoise : ces fréquentations mettent en danger l’honneur des jeunes filles et suscitent l’hostilité des autorités ecclésiastiques et civiles. "Mieux vaut bonne renommée que ceinture dorée", dit un proverbe.
Pour mettre à l’honneur la Vertu, dans l’Oise, les Deux-Sèvres, le lot-et-Garonne et la Gironde, un jury de notables civils et religieux, aidé de commères bien informées, s’arrange pour récompenser chaque année, avec beaucoup d’éclats, une jeune fille, souvent de condition très modeste, mais très appréciée de tous pour ses qualités familiales et surtout pour sa grande réputation de Vertu.
Cette jeune fille la plus vertueuse reçoit le titre de Rosière en même temps qu’elle reçoit à l’église, au cours d’une cérémonie religieuse fastueuse, une couronne de roses blanches, symbole de la pureté, attribut de la vertu féminine, figuration de la Vierge. Cette fête - remise au goût du jour par Napoléon 1er - se déroule chaque année au mois de juin, elle récompense dans les villages une jeune fille nécessiteuse, vertueuse et méritante.
Célébrées pendant toute une journée au cours de festivités mi-laïques mi-religieuses, les Rosières reçoivent une dot communale... et une robe de mariée. Dans une ambiance bon enfant, les plus jeunes approchent la Rosière avec des yeux émerveillés. Vêtue de sa robe de mariée, cette jeune fille qu'ils connaissent souvent s'est soudainement métamorphosée en une femme-fée. Heureuse d'avoir été choisie, elle se prête de bonne grâce aux festivités de la journée, n'hésitant pas à jouer aux boules. Le soir, reine du bal de la Rosière, elle accordera une danse à chacun.
Dans d’autres bourgades, on met dans l’urne électorale une quantité de bulletins blancs égale au nombre de jeunes filles "sérieuses" mais sur l’un d’entre eux, on ajoute : "Dieu l’a choisie". Devant monsieur le Maire, elles plongent leur blanche main droite dans l’urne : "la gente citoyenne qui ramène le bulletin écrit est proclamée Rosière, sans jalousie, ni animosité puisque Dieu l’a choisie..."
A la fin de la messe, pendant que les cloches sonnent à toute volée, derrière le garde-champêtre et son tambour, la rosière rougissante traverse le village au bras de monsieur le Maire, suivi de la rosière de l’année précédente au bras de l’adjoint... Parfois la couronne de roses est accompagnée d’un bijou mais plus souvent d’une somme d’argent ou d’un livret de Caisse d’épargne... "Des communes dotaient d’une somme considérable une jeune fille vertueuse pour l’unir à un ancien combattant de bonne conduite." Si les rosières avaient toujours la vertu de Dieu, elles avaient parfois, hélas, la beauté du diable...
La tradition s'est largement perdue mais quelques villages fêtent encore leurs Rosières. Quoi qu'il en soit, ma Mamie détestait la fête de la Rosière.
C'était pas son truc.
Collection "Mamie est sortie"
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