Avertissement : Cet article fait parti de la collection C'est quand le bonheur ?, il s'adresse à toutes les personnes qui ont une âme de villageois...
Boris Cyrulnik est formel.
Le bonheur est provoqué par une représentation, une anticipation, un rêve. Il a une connotation beaucoup plus psychologique et sociale qu'émotionnelle.
A proprement parler, il n'y a pas de zone de bonheur, alors que la zone de l'émotion euphorique existe bien. Elle peut être associé au bonheur, mais je préfère ne pas parler de "bonheur", plutôt d"émotion euphorique". De même, je ne dis pas "malheur" mais "émotion d'angoisse" ou "émotion de détresse".
La prédisposition au bonheur... J'ai parfois utilisé l'expression de "formule chimique du bonheur" dans un sens un peu ironique. La sérotonine est un neuromédiateur qui provoque des sensations d'euphorie, et sa sécrétion peut être augmentée par les antidépresseurs, par la consommation de vin, par une bonne relation humaine ou une bonne pièce de théâtre.
Elle n'est donc pas provoquée uniquement par des déterminants neurologiques, mais aussi par des déterminants culturels.
Certains individus sont génétiquement de gros transporteurs de sérotonine. D'autres au contraire, sont génétiquement de petits transporteurs. Les premiers sont très difficiles à stresser et se remettent rapidement des malheurs. Les seconds sont très émotionnels et se contrarient tout de suite.
Attention, ça ne veut pas dire que certaines personnes sont programmées pour le bonheur et d'autres pour le malheur. Les gros transporteurs de sérotonine sont souvent des preneurs de risques, ils encaissent beaucoup de coups. Au bout d'un moment, à force de lutter contre l'adversité, le cerveau s'abîme, le coeur s'abîme... et le sujet déprime.
A l'inverse, les petits transporteurs de sérotonine, ceux génétiquement "doués" pour le malheur, se savent fragiles. Ils organisent une vie stable et tellement équilibrée qu'ils ne dépriment pas. Aurement dit, nous sommes des être à la fois biologiques et historiques, capables d'évoluer en fonction de l'idée que nous nous faisons de nous-mêmes et de ceux qui nous entourent.
En Afrique, on dit qu'il faut tout un village pour éduquer un enfant. Il faudrait piquer cette idée aux africains. Un couple ou une mère ne peut élever seul son enfant sans prendre le risque de vivre une forme d'enfermement avec lui.
Dans notre société organisée par la technologie et centrée autour de la performance individuelle, on a détruit le village, on a ridiculisé le scoutisme et les autres activités pour jeunes. Il y a une génération ou deux, une femme qui mettait au monde un enfant était glorifiée et entourée. Aujourd'hui, nous avons donc besoin de réinventer un village occidental pour ne pas qu'elle reste isolée.
Au boulot donc.