"Souvenirs souvenirs...
Bons ou mauvais, nos souvenirs sont liés de façon indéniable à notre personne la plus profonde. Ils sont les gardiens de notre temple intérieur, comme nos rêves, disait Freud, sont les gardiens de notre sommeil.
Nos souvenirs nous parlent, mais de quoi nous parlent-ils ?
De ce que nous avons été, de ce que nous avons vécu. Mais aussi et peut être surtout de la façon dont nous l’avons vécu.
Gabriel Garcia Marquez ne disait-il pas : "La vie, ce n’est pas ce que l’on a vécu, mais ce dont on se souvient et comment on s’en souvient."
Les souvenirs d'enfance, lorsqu'ils ne sont pas la trace d'évènements terribles, sont des niches affectives extraordinaires de drôlerie, d'intelligence, de tendresse, de malice. La vie se dit ici en toute simplicité. Dans toute sa multiplicité aussi.
"Nos souvenirs sont les gardiens de notre temple intérieur"
C'est bien naturel. Combien de vies dans une ?
Trois, cinq, dix, davantage. Si on regarde la vie de Solange Benitez, elle en dénombre déjà douze. La maison de sa naissance, son premier déménagement à l'avenue Jean-Jaures, l'école primaire Jean Moulin, sa vie de femme mariée, sa grande histoire d'amour...
Chacune de ces vies a contribuer à transformer chaque fois un peu plus l'enfant, la jeune femme, puis la dame qu'elle a été et qu'elle est. Combien de tranches de vies lui reste-t-elle encore à vivre ? Combien de souvenirs restent-ils à se construire ? Comment les interpréter ?
Les souvenirs sont la marque indélébile de notre individualité, notre signature personnelle, la preuve que ce que nous avons vécu nous a appartenu en propre et n'appartiendra jamais à personne d'autre.
Toute notre vie est enveloppée de souvenirs. Ils sont notre peau intérieure. Ce n'est que dans certaines circonstances que nous laissons place à nos souvenirs et souvent même à notre insu, une odeur de café, un parfum, une image, un son.
Nos souvenirs réunissent tout ce qu'on a ressenti en bien et en mal. On peut dépouiller les gens, violer leur intimité, les priver de ce qu'ils ont de plus cher, les laisser démunis, sans ressource ; on ne peut dérober leurs souvenirs.
Mais on se souvient de quoi ?
Laissez moi vous relater une expérience : une équipe de psychologues a montré à un groupe de volontaires des photos de personnes qui leur ont été présentées par leur nom, en leur demande de les mémoriser. Ils ont présenté à un autre groupe de personnes les mêmes photos mais en leur indiquant le métier qu'ils excerçaient. Quelque temps plus tard, on leur a remontré les photos et on leur a demandé d'essayer de se souvenir de "qui était qui". Si les volontaires du premier groupe ont eu beaucoup de mal à se souvenir du nom des personnes, en revanche, ceux du second se souvenaient nettement mieux du métier qu'ils exerçaient.
L'explication est simple, les noms propres ne signifient rien, ils caractérisent simplement la personne qui le porte tandis que le métier donne de nombreux détails sur ce qu'il fait, avec quoi il travaille, ce qu'il produit, avec quelles sortes de gens il est en contact, ce qui facilite d'autant le travail de remémorisation.
Ce qui explique aussi pourquoi beaucoup de personnes lors d'un premier contact commencent par : "Qu'est-ce que vous faites dans la vie ?", ça dévoile le présent mais aussi souvent le passé.
Montre-moi tes souvenirs je te dirais qui tu es ! Les souvenirs avec les animaux fournissent généralement nombre de détails sur la vie affective de la personne et aussi, sur son degré de sociabilité. Les lieux aussi, si en racontant votre souvenir vous commencez par "chez moi", "à la maison", " chez ma grand mère", ça dénote une dimension sécuritaire via l'habitat. Si au contraire vous commencez par "à l'école", "à l'église"... on fait plutôt référence à la communauté. Tandis que si on attaque par "en afrique", " en guadeloupe", "en amérique", il sera aisé de voir un passé révolu mais tinté de nostalgie.
Racontez vos premiers souvenirs, les scoop de votre vie, faites parler votre coeur d'enfant...
Des "Moi, quand j'étais gamin..." ou des " Vous n'allez pas en revenir mais..." ou des "Moi, mon premier souvenir, ça remonte à ...", suivi d'une histoire personnelle.
Car les souvenirs sont toujours des histoires de soi, des histoires en soi, drôles, tristes, fantastiques, incroyables, phénoménales, ou ordinaires, qu'importe, ce sont des histoires de vie dont nous sommes le personnage principal, l'acteur de nos souvenirs mais aussi le metteur en scène ...