"La France immortelle.
La Royal Air Force lance sur Berlin la plus violente attaque aérienne depuis le début du conflit. 2 500 tonnes de bombes sont larguées.
Le 6 juin, 176 000 hommes débarquent sur les côtes normandes pour l'opération Overlord. C'est le D-Day.
Le 20 juillet, l'attentat manqué contre Adolf Hitler à son quartier général de Rastenburg va être suivie d'une répression féroce. Cette conspiration était organisée surtout par des officiers supérieurs (comme Claus Scenk von Stauffenberg).
En août, tout converge vers la bataille de Paris.
Près de Chalon-sur-Saône, la péniche Citerne IV chargée de 200 000 litres de vin a disparu, enlevée par le maquis.
C'est la débacle allemande. Les coups de feu commencent à éclater à la ronde. Des voitures, le plus souvent des 11 CV Citroën favorites des allemands et des "Fifis" (FFI) circulent à toute vitesse. Dans Paris le nombre de résistants portants le brassard timbré FFI ou FTP était inversement proportionnel au nombre d'occupants. On les surnomme les "résistants du mois d'août". Entre le 19 et le 25 août, la situation de Paris est trouble, on tond les femmes, celles qui ont collaboré avec l'occupant ou qui ont trompé leur mari avec un voisin. On règle les comptes. Comme on ne pouvait pas tondre tous les collabo, on a surtout tondu les femmes qui couchaient avec leur voisin. Il y a eu à Paris durant ces quelques jours de vrais héros et de faux-jetons. Comme toujours.
Paris est libéré. Le général De Gaulle défile triomphalement sur les Champs-Elysées. Vit-on jamais une pareille fête ? La semaine qui a vu la libération de Paris, une semaine de huit jours, est la plus belle image de la légende française. Et Paris a brûlé. De haine pour l'occupant, après quatre années de privations. De fierté et de joie, surtout, dans la liberté retrouvée. On ne peut certes pas dire mieux que le fameux " Paris, Paris... Mais Paris libéré, libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France." Et avec celle des alliés aussi...
Le journal Libé n'est plus clandestin, elle reparaît au grand jour et coûte 2 F. Il invite à pavoiser la capitale avec drapeaux tricolores et anglais et américains et soviétiques. Il invite également à l'insurrection, aux barricades. Et ne mâche pas ses mots : " Pas un boche ne doit sortir vivant de Paris Insurgé" puis "A chaque Parisien son boche".
Vive la France immortelle. C'est bien joli l'immortalité mais il faut penser à un avenir plus immédiat. Ah le petit vin blanc de Lina Margy redonne le sourire.
La période qu'on appelle La libération peut commencer. L'exaltation est à son comble. Mais dans cette exaltation il y a une part de tristesse. Un très lourd tribut a été versé à cette libération.
"Nous pouvons dire que nous sortons de ce conflit la nation la plus puissante du monde, peut-être la nation la plus puissante de l'histoire." Cette sentence du président américain Truman a le mérite d'être claire. L'Amérique a gagné la guerre, elle a libéré l'Europe de ses vieux démons et dans les poches des GI's débarquent les produits made in USA. Got any gum, chum ? (T'as pas du chewing gum, mon pote ?) lancent les gamins français aux soldats américains sur les bords des routes de la libération.
Les chewing-gums ? Des Wrigley's évidemment, mis au point par William Wrigley, devenu dès 1890, le roi de la gum à Chicago.
Les cigarettes blondes au goût de miel ? Ce sont les Lucky Strike, accrochés à l'élastique du casque des GI's. Les autres Camel, Pall Mall, Chesterfield ou Old Gold. Des cigarettes que l'on ne saurait allumer avec autre chose qu'un Zippo, le briquet des troupes américaines.
Pourtant, si l'engouement pour les produits made in USA est certain, il ne fait que passer, le temps de la libération. La pénurie, elle, est toujours bien là.
Les Français boudent encore les quelques 500 000 bistrots de l'hexagone. Alors ce n'est surement pas pour aller y boire du Coca-Cola... Mais l'Amérique est de plus en plus au goût du jour. Pour preuve, le "bikini", maillot deux pièces présenté pour la première fois à Paris à la piscine Molitor en 46, doit son nom à l'atoll du pacifique où les américains affectuent alors leurs essais nucléaires.
A Paris, tout le monde n'apprécie pas cet impérialisme culturel venu d'outre-atlantique. "Allez voir les navets américains, c'est vous priver de beurre", peut-on lire sur une pancarte, sur les grands boulevards en janvier 48. Ce qui n'empêchera pas les ventes de chewing-gum de décoller à la fin de la décennie lorsque Courtland Parfet, un ancien GI, mettra sur le marché son propre chewing gum au goût de chlorophylle, auquel il donnera l'un des noms les plus symboliques des USA, celui de la célèbre ville d'Hollywood.
Le chant des partisans après avoir été sifflé sur les ondes de la BBC est promu "Chant de la libération".
La guerre est finie. On peut enfin voir la vie en rose...